Fabrice Tassel – On dirait

des hommes

vagabondageautourdesoi.com - Fabrice Tassel - Quatrième roman de Fabrice Tassel, On dirait des hommes, présente, autour du travail d’une juge d’instruction, deux histoires de couples aux prises avec deux virilités malsaines que tout semble opposer.

Ce roman noir, à l’intrigue à tiroirs et à la révélation finale que l’on pressent au fur et à mesure, est particulièrement précis et maîtrisé même si un dégoût reste dans la bouche, bien après le livre refermé.

Dominique Bondet, juge d’instruction, décide de prendre tout son temps pour conclure l’enquête sur l’accident du jeune Gabriel, âgé de 10 ans, ayant buté sur un anneau d’amarrage, un soir de tempête, noyé en quelques minutes, malgré la tentative de sauvetage de son père.

Depuis, Thomas Sénéchal et sa femme, Anna, se sont installés dans la région de l’accident et tentent de se reconstruire. Elle a sa profession dédiée aux autres. Car, en tant qu’infirmière, elle a trouvé rapidement du travail, comme d’habitude. Pour Thomas, ce fut plus incertain mais maintenant, cela va beaucoup mieux !

Leurs vies vont croiser le couple d’Inès et Patrice Le Bihan qui auront eux aussi affaire à la juge d’instruction.

D’un couple souffrant de la perte de leur unique enfant, Fabrice Tassel construit une illustration de deux virilités qui s’opposent. Mais, difficile d’en dire davantage, sans révéler toute l’intrigue.

En tout cas, un très beau portrait d’une juge d’instruction avec le droit chevillé à ses convictions ! Et, au-delà des portraits masculins, Fabrice Tassel montre  comment la solidarité féminine épaule l’avancée des droits des femmes.

Fabrice Tassel offre avec On dirait des hommes un roman noir d’une grande intensité sur des sujets actuels mais sous un aspect assez peu connu. C’est brillant avec une écriture alerte et attrayante et une construction très maîtrisée ! Du bel ouvrage, à recommander !

Puis quelques extraits

cite-56a4b9b45f9b58b7d0d8877b

Tout reste fragile. Chasser le souvenir de l’accident est une tâche impossible, il est sous la peau, dans chaque cellule du cerveau. il faut vivre avec, ou alors se foutre en l’air. Ils ont choisi de vivre. 

“Rendre justice, c’est aussi réparer, panser, cautériser, nous sommes des médecins de la mémoire, tu comprends ? “

Ils vivent depuis onze mois avec le vent de face, au point de presque l’oublier, comme si une fourme sourde du deuil s’était glissée pour toujours dans leur quotidien. Pour elle, la fréquentation de la souffrance, de l’angoisse, souvent de la peur, est un rituel.

Elle va encore naviguer entre la haine d’un homme et d’une femme. Plonger dans leur intimité, leurs névroses, leur passé. Pourtant, elle n’aura jamais le temps pour tout comprendre. Ce n’est d’ailleurs pas son rôle, elle doit prouver des faits, en réfuter d’autres, pas réaliser des analyses psychologiques, mais c’est plus fort qu’elle : elle aime aller au bout de sentiments humains, réaliser la jonction la plus fine possible entre un geste et ses racines, se glisser dans la peau et la tête de celui qui frappe après avoir aimé, de celle qui souffre dans sa chair et trouve le courage, un jour, de pousser la porte de la gendarmerie.

Une amie psy de Dominique lui a un jour résumé la situation des femmes sous emprise : ” Si on la plonge dans l’eau bouillante, la grenouille va s’échapper d’un bond. Mais si la température grimpe petit à petit, elle ne va pas prendre conscience du danger et finira par mourir ébouillantée.”

Et encore,

Elle n’a jamais eu l’impression de souffrir, mais elle s’est effacée pour leur bonheur.

Depuis combien de temps vit-elle autour du nombril de Thomas ?

Un enfant avec l’homme qu’elle aime encore mais qu’elle ne s’interdit plus de laisser derrière elle.

Elle sait voir l’accumulation des signaux qu induisent le doute, les visages, le matin, encore gonflés des larmes de la nuit. les pulls trop longs même aux beaux jours, ces peaux cachées qui sont autant de cris silencieux.

Mais, elle connaît aussi le chemin, incertain, long, parfois sans fin, jusqu’à la certitude d’être en face d’une femme battue.

(…) c’est ça, l’emprise: faire de l’autre son objet. C’est l’enfermer dans un monde en apparence normal mais clos, séparé de l’extérieur par une cloison de silence derrière laquelle l’horreur peut devenir la norme.

D’ailleurs, ce n’est pas toujours l’horreur et la violence physique qui se déploient. Certains prédateurs jouissent seulement d’avoir la maîtrise totale de l’autre, de la vie du couple ou de la famille, du récit qui transparaît à l’extérieur. Leur profil est plus rare, mais ça existe. C’est le comble de la lâcheté, la fuite dans le mensonge, l’installation dans une vie parallèle et réinventée.

Mais alors, c’était quoi un type bien ? Ne pas frapper sa femme, ne pas abuser d’elle ne suffisait même plus ?

Ceux qui ont déjà tout ne cessent de répéter qu’il faut ” se réinventer” .

Ici en bref

D'habitude, je ne partage pas mes lectures lorsqu'elles ne m'ont pas plue ! Mais, là, c'est le livre qui se vend à plus

vagabondageautourdesoi.com - Fabrice Tassel -
Incipit
vagabondageautourdesoi.com - Fabrice Tassel -
Extrait
vagabondageautourdesoi.com - Fabrice Tassel -
Puis le dernier

Du côté des critiques

Le Monde

Du côté des blogs

Ce que j’en dit …Amicalement noir

Questions pratiques

vagabondageautourdesoi.com - Fabrice Tassel -
Quatrième de couverture

Fabrice Tassel – On dirait des hommes

Éditeur : La Manufacture des livres

Twitter : @LaManufDeLivres Instagram : @la_manufacture_de_livres

Facebook

Parution : 6 avril 2023

EAN : 9782358879613

Lecture : Juin 2023

Littérature contemporaine

Littérature générale

Auteurs commençant par T

Chroniques littéraires

10 commentaires

    • Oui, je suis contente d’avoir passé ce séjour à découvrir une partie de ce pays très attachant ! Mais, je n’ai pas giji d’en parler ici 😄 Bel été !

    • Vraiment une très belle découverte pour moi que je recommande. Une construction du récit très maitrisée qui évoque des sujets tout à fait d’actualité.Bon début de semaine

    • Oui, tu as raison, le sujet est souvent traité, mais sous cet aspect particulier est assez neuf et surtout la construction du roman est parfaitement étonnante . Bon week-end 😉

    • La nouveauté de ce roman est la façon dont Fabrice Tassel s’attaque au problème. Dès le début, avec la rencontre de la juge d’instruction, on se doute que cette histoire d’accident sera au centre de l’intrigue, néanmoins, son traitement complexe et parfaitement maîtrisé est particulièrement réussi! A découvrir je pense ! Bon week-end 😎

Un petit mot ...

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.