Si nous avions su que nous l’aimions tant nous l’aurions aimé davantage
Pour Bertrand Tavernier
Thierry Frémaux propose un hommage à l’immense cinéphile et réalisateur que fut Bertrand Tavernier. Son essai “Si nous avions su que nous l’aimions tant nous l’aurions aimé davantage” livre un portrait fouillé, documenté et élogieux de cet homme qui m’a fait aimé, à distance, le cinéma.
Bertrand Tavernier était un pédagogue passionné, né par et pour le cinéma. Est-ce qu’il y a plus fort comme terme que cinéphile ? Parce-que le cinéma était toute sa vie.
Rue du Premier-film
Thierry Frémaux raconte son compagnonnage au côté de Bertrand Tavernier : de la création de l’institut Lumière en 1982 à sa présidence jusqu’à la fin de sa vie en 2021, rue du Premier-Film à Lyon.
Quarante ans d’amitié décrites avec beaucoup de tendresse ! Aucune révélation privée, Bertrand Tavernier ne l’aurait pas supportée ! Plutôt la description d’un homme passionné, acceptant de reconnaître s’être trompé lors d’un avis, cherchant jusqu’à la fin à compléter sa culture, pourtant si phénoménale que personne ne peut le remplacer !
Par trois fois, Bertrand Tavernier était venu parlé de son film du moment dans mon cinéma de banlieue. A chaque fois, le silence qui régnait montrait combien chaque spectateur était honoré de recevoir ses anecdotes, ses confidences sur la manière de monter telle ou telle scène, etc. Aucun de ceux présents regardait sa montre pour s’inquiéter de l’heure qui passait trop vite. Cet homme était d’une simplicité si désarmante avec son imper et son échappe rouge que j’aurais donné beaucoup pour suivre ses Matersclass si elles avaient existé.
Thierry Frémaux nous fait revivre cet homme que nous avions suivis presque pas à pas dans son œuvre : L’horloger de Saint-Paul en 1974, dont j’ai cherché la boutique lors d’une balade dans les Traboules, Que la fête commence où ses trois compères sont en costume d’époque (un must), Le juge et l’Assassin avec Galabru avec un rôle dramatique, La mort en direct où Romy précède Loana, Le coup du torchon avec un Eddy Mitchel en Nono … Je m’arrête là. Tous ses films font partis de notre culture cinématographique jusqu’au dernier Voyage à travers le cinéma américain qu’il nous a laissé comme un testament.
Pour conclure,
J’ai découvert l’amitié de Thierry Frémaux pour cet amoureux du cinéma. “Si nous avions su que nous l’aimions tant nous l’aurions aimé davantage” est bien plus qu’un hommage c’est une ode au cinéma avec de multitudes précisions concernant les films réalisés par Bertrand Tavernier mais ceux aussi qu’il aimait. Le portrait qui se dégage est conforme à l’homme que nous connaissions, au savoir infini mais aussi au valeurs humanistes que nous pressentions où le fait de douter n’était pas la moindre de ses qualités.
Pour aller plus loin
Remerciements
@editionsgrasset @NetGalleyFrance pour #PourBertrandTavernier de #ThierryFremaux
Puis quelques extraits
A 20 ans, on est bénévole pour tout, pour n’importe quoi, je pouvais l’être dans cette aventure incertaine, justement parce qu’elle était incertaine.
Les classiques, on pense toujours qu’on les connaît, qu’on les a vus dans ces vies antérieures qu’on s’invente à mesure que l’existence se déroule, mais ça n’est pas toujours vrai.
Le talent réside aussi dans le regard que l’on porte sur les choses. Il l’avait, il nous l’a appris.
Ces types avaient dédié leur existence au cinéma et apprenaient en arrivant à Lyon que la première ” vue” du Cinématographe avait été tournée là et que des gens tentaient de redonner une nouvelle mémoire au site. Ils venaient.
Bertrand détestait s’ennuyer, quiconque l’amusait et lui enseignait ce qu’il ignorait, était le bienvenu. Et Bertrand rendait nos vies divertissantes.
Et encore,
Une amitié se déploie toujours en moments multiples, successifs, qui en approfondissent l’intensité en même temps qu’ils la testent, l’affermissent, et ouvrent un avenir commun.
Quand nous présentions des films, il cherchait mon regard et mon acquiescement. Il les avait. Pour le reste, j’écoutais. Et il crachait la fumée. Si je m’avisais de le relancer, nous en reprenions pour un quart d’heure. Il était incorrigible mais d’une œuvre, il tenait à évoquer les plis les replis et les ourlets.
Sa méthode ramenait toujours à l’esthétique, à la technique et à l’érudition, celle qu’on sacralise quand il s’agit de musique, de littérature ou de peinture et dont on se méfie chez les cinéphiles, dont le nom résonne comme celui d’une maladie. Elle nous plongeait pourtant dans un ravissement sans fin.
Il se moquait des acrimonieux qui disaient de nos projets : ” Ça fait ciné-club”, convaincu que l’offense était un compliment suprême car ceux-là ignoraient que le mouvement des ciné-club fut le levain de la grande génération des intellectuels français pour qui le cinéma était un instrument de reconstruction du monde.
Bertrand débarquait dès qu’on faisait appel à lui, ne nous faisant jamais défaut. Il enseignait les vertus de la connaissance et celles de la contradiction : se soustraire aux clichés, ne parler que des films qu’on a vus, donc en découvrir le plus possible; ne pas subir la réputation de la rumeur, aller voir par soi-même, ne jamais penser en bandes, douter, douter, douter.
Et encore, encore
(…) la vie et la personnalité des gens sont toujours plus complexes que les schémas expéditifs auxquels on les réduit souvent. Ça ne les excuse pas, mais force juste à n’être sûr de rien et en tout cas, à rester tolérant.
Il ne disait pas ” Moteur” mais ” On peut ? “.
Il laisse un héritage unique, infini. Et prometteur car il sera comme lui plein de rires, de poings levés et de grandes ambitions.
“ Il est d’autres pandémies qui menacent. Ce sont le culte de l’argent, le libéralisme effréné, le fanatisme, l’arrogance. C’est tout ce qui crée une autre zone écarlate : celle de l’ignorance. Nos films, nos pièces, nos spectacles, peuvent permettre d’y résister. Le cinéma fabrique des armes de construction massive (…) ” Bertrand Tavernier
A l’image de certains timides, il était bavard, et comme certains bavards, il était secret.
A Cannes, l’effervescence des fêtes et des foules n’empêche pas ceux qui livrent des films de se retrouver dans une extrême solitude, il le savait.
Ici en bref


Du côté des critiques
Questions pratiques
Thierry Frémaux
Twitter : @cannesnews Instagram : @thierry.fremaux
Si nous avions su que nous l’aimions tant nous l’aurions aimé davantage
Pour Bertrand Tavernier
Éditeur : Grasset
Twitter : @editionsgrasset Instagram : @editionsgrasset
Parution : 28 septembre 2022
EAN : 9782246832171
Lecture : Septembre 2022
Le titre du livre est magnifique, Bertrand Tavernier était un grand cinéaste et Thierry Frémaux un grand délégué général du Festival de Cannes, mais enfin, à part deux ou trois très belles pages sur le lien qui unissait les deux hommes, l’hommage est d’une grande platitude. L’auteur déroule l’agenda dans lequel il a noté ses rendez-vous et ses rencontres en énumérant celles et ceux qu’il a rencontrés en compagnie de Tavernier et les films que celui-ci a présentés mais cela ne va pas plus loin, l’hagiographie (c’en est une et Frémaux ne s’en cache pas) est très désincarnée.
J’avoue n’avoir pas eu le même ressenti. L’admiration est à chaque paragraphe palpable. Certes aucune révélation sur la vie privée mais le récit de cette grande curiosité que possédait l’homme et qu’il savait partager en toutes circonstances. J’ai aimé le respect du narrateur pour cet immense puits de culture cinématographique qu’était Bertrant Tavernier !
[…] 9. Si nous avions su que nous l’aimions tant nous l’aurions aimé davantage – Pour Bertr… […]
Pas un de mes cinéaste préféré, même si je ne boude pas ses films.
J’ai admiré tellement le cinéphile
que de chefs d’oeuvre ses films : coup de torchon, un dimanche à la campagne ou le dérangeant “l’appât”
Oui, j’avais oublié celui-ci …Un grand Monsieur du cinéma !
Je connais mal le cinéma mais ce livre a l air très intéressant. Bonne journée
Le cinéma de Bertrand tavernier m’a accompagnée et je suis très admirative de son engagement pour le cinéma. Bonne soirée !
Je connais très mal les films de Tavernier mais je voudrais en regarder quelques uns. Je pense qu’il a réalisé de belles choses.