Rentrée littéraire hiver 2022
Après Les malheurs du bas, son premier roman, Inès Bayard propose Steglitz, un roman étrange autour d’un portrait de femme à la fois mystérieue et singulière dans un des quartier au sud-ouest de Berlin
Léni est satisfaite de sa vie solitaire, banale et rythmée d’activités routinières auprès de son mari, Ivan Müller, architecte qui travaille le plus souvent chez lui mais sans que sa femme sache quoique se soit sur ses activités. Sa vie est aisée, sans problème semble-t-il particulier. Elle ne s’intéresse à rien d’autre que ses tâches domestiques journalières et passe son temps à rêver. Répondre à un dialogue avec une personne rencontrée dans la rue la met dans un état proche d’une violence irraisonnée. Mais, elle aime particulièrement aussi se perdre sans but précis dans ce quartier tranquille.
Un jour, le lieutenant Ziegler entre dans son antre pour demander si personne n’aurait entendu des coups de feu. Le mari ne souhaite pas qu’on interroge sa femme; Néanmoins, cet homme va prendre une certaine importance pour Léni et sera à la fois sa bouée de sauvetage et son persécuteur. La fin n’éclairera pas plus l’intrigue
Léni rencontre un jour sur le banc d’un parc une présence qu’elle assimile à son père, qui est mort. Une autre fois, elle assiste à un enterrement en tant que spectatrice.
Son mari va charger Émile, le frère de Léni, de lui trouver une autre maison où elle acquiert une certaine liberté de ton mais un emprisonnement physique.
Il ne semble pas avoir de sens à cette histoire de femme sauf à décrire un délire à la fois paranoïaque où plusieurs personnalités se succèdent : L’absente obéissante, l’employée échappant de justesse à l’esclavage mais attentive aux autres, celle spectatrice d’un incident traumatique, ou la femme qui se laisse aimer. Et, puis, il y a la voix qui hurle dans la nuit le nom de ce quartier…
Le quartier Steglitz est un personnage à part entière puisque le lecteur suit souvent Léni dans ses pérégrinations pédestres. Dans ce quartier qui semble tranquille, un bâtiment pourtant garde une histoire traumatique celle de la conférence de Wannsee, qui organisa la déportation des juifs d’Europe de l’Est. Mais, rien dans le roman n’indique un lien avec cette histoire sombre et la vie de Léni.
Le premier roman d‘Inès Bayard m’avait laissée abasourdie devant tant la violence qu’il contenait. Les codes littéraires avaient sauté rendant complétement inerte la lectrice que j’étais. Celui-ci est plus normalisé donc plus acceptable ! Néanmoins, l’impression de l’étrangeté de son personnage principal habite ce texte encore très. Je ne peux dire si j’ai aimé ! Il m’a encore déstabilisée et pourtant, je l’ai lu presque d’une traite, subjuguée devant les intentions de l’écrivaine que je n’ai pu découvrir.
Autant dire qu’Inès Bayard s’inscrit dans la littérature avec une écriture fouillée au service de portraits de femmes étranges et décalés qui met mal à l’aise puisque l’écrivaine ne se laisse aucunement dévoilée. Steglitz surprend par son intensité et sa capacité à habiter un espace littéraire étrange et mystérieux. De ce point de vue, c’est un excellent roman qui déstabilise encore profondément !
Pour aller plus loin
Le malheur du bas – Inès Bayard
Puis quelques extraits
J’ouvrirai les yeux le matin et je les fermerai le soir avec le même sentiment d’accomplissement. . Entre temps , pourvu qu’il ne se passe rien.
Que le temps s’écoule sans confusion ni surprise, c’était précisément cela qui la rendait heureuse.
Il existe cependant des gens pour qui la faiblesse fait office d’habitude, pensa-t-il. Et une fois pris au piège de leur condition précaire, ils ne souhaitaient jamais s’en détacher complètement. Ils s’en accommodent, avant d’en jouir, malgré les efforts désespérés de leur entourage. (…) Ivan Müller réalisa qu’il ne se sentait pas suffisamment concerné par l’état de son épouse pour s’y intéresser davantage, du moins au prix de sa carrière.
Leni aimait imaginer les visages des personnes disparues, leurs habitudes, la façon dont elles s’habillaient. Regardant autour d’elle les immeubles au crépi gris et beige usé par la pluie, mille questions l’assaillaient.
Sils étaient revenus, qu’auraient-ils pensé de Berlin ?
Ici en bref

Puis un troisième
D’autres blog en parlent
Julie chronique ses lectures – Lire est le propre de l’homme –
Questions pratiques
Inès Bayard – Steglitz
Éditeur : Albin Michel
Twitter : @AlbinMichel Instagram : @editionsalbinmichel
Parution : 5 janvier 2022
EAN : 9782226449153
Lecture : Janvier 2022
Il est dans ma PAL car il m’intrigue ce premier roman 😉 Quelle rentrée pour Albin Michel 🙂
J’aurais plaisir à lire ton avis alors !
Bonjour Matatoune. Je n’ai aucune envie de le lire pour le moment, s’il est aussi déstabilisant.
Oui, je crois qu’il ne te plairait pas ! Bonne soirée
Tu me donnes envie de découvrir ce style particulier.
A suivre donc avec ton avis 🙂
Ah le malheur du bas, une claque, un vertige ! Je veux lire celui-ci tout autant !! J’aime tant être désemparée, bousculée durant une lecture…
Alors, il ne faut pas hésiter et j’aurais bcp de plaisir à avoir votre avis 🙂
Les malheurs du bas : je n’avais aucune envie de le lire et apparemment celui-ci non plus….. 🙂
Au moins, c’est catégorique 🙂
Votre présentation a titillé ma curiosité. Parfois j’aime les livres mystérieux où on ne comprend pas tout. Par contre je n’aime pas être trop bousculée ou effrayée.
Le lecteur n’est pas bousculé mais j’avoue n’avoir pas relié entre eux tous les fils que déploie Inès Bayard . Un peu frustrant quand-même !
le sujet est très intéressant, je le note, mais pour plus tard, le début d’année est encore trop anxiogène pour moi, pour le laisser de côté pour l’instant
Oui, difficile début d’année et ce roman ne va pas alléger l’ambiance, tout à fait d’accord. Bon courage !
Un livre bien trop tiré par les cheveux pour moi et je n’aime pas être larguée tout au long d’un livre, étant trop cartésienne pour ça
Merci pour cet article qui, lui, est limpide !
C’est vrai que moi aussi qui aime bien les choses claires et précises, l’écriture d’Inès Bayard est un grand mystère pour moi 🙂
je vais essayer d’être raisonnable vue la longueur de ma liste sur NetGalley babelio et la BM …
je suis plongée dans la plus secrète mémoire des hommes alors côté littéraire je pense que cela suffit 🙂
Ah oui, je comprends. Le prochain, un petit thriller ? 🙂
Il ne m’attire pas du tout mais ça arrive. bonne semaine bisous
Oui bien sûr! Très bonne semaine !
Ce livre a l’air intrigant mais il ne m’attire pas, sûrement trop littéraire. Bonne journée et bonne semaine
Je suis satisfaite de l’avoir découvert mais c’est vrai qu’il est inquiétant ! Bonne soirée