Dans le taxi
RENTREE LITTERAIRE 2023

Sylvain Prudhomme a d’abord un style : des phrases mots succèdent à celles enchevêtrées de propositions aux formules précieuses et évocatrices. Ce travail de dentellière est un régal que l’on déguste dès la lecture des premières lignes. Puis, le sens de l’intrigue happe rapidement avec une phrase de deux pages pour révéler un secret qui ne se dit toujours pas ! Ce jeu de cache-cache s’effectue pendant six pages. En chemin, il y eut un cimetière, des visages boursouflés de douleur, et un croque-mort qui se prend pour un psychologue, et enfin la colère de Simon, le narrateur.
L’enfant dans le taxi commence par la rencontre entre une fermière et un soldat français que ses parents hébergent au bord du Lac de Constance. Puis, à la suite d’un enterrement, les langues se délient à la fin de la cérémonie. Alors, plutôt que d’avoir à expliquer pourquoi le petit-fils, Simon, est venu seul, un invité s’attarde avec lui sur l’existence de M., qui devient quelques lignes plus loin, le fils allemand de Malusci, le grand-père enterré.
Au fur et à mesure que Simon doit gérer sa famille monoparentale, il s’appuie sur certains membres de la famille pour chercher les réponses à un secret que tout le monde connaît mais dont personne ne parle. Certains, même, cherchent à l’en empêcher. Mais, l’esprit libéré de Simon lui permet de se pencher sur cette histoire dont il reconnaît, lui-même, qu’il ne sait vraiment pourquoi elle l’attire.
Secret ou déni
Évidemment, l’écrivain échappe à tous les points attendus du genre. Il surprend tout le temps et jusqu’à la fin : un fils caché mais si proche, un amour pendant la guerre dont déjà l’écrivain a parlé dans un précédent roman et le narrateur découvrant sa nouvelle vie familiale.
Sylvain Prudhomme crée une partie de cache-cache littéraire menée entre le récit du ressenti de son narrateur, Simon, qui essaye de s’inventer un nouvel équilibre et la recherche d’un oncle, lointain et pourtant déjà si présent. Mais, réduire L’enfant dans le taxi à ces deux axes ne peut rendre compte de sa puissance narrative.
Sylvain Prudhomme maîtrise parfaitement les codes de l’intrigue et ceux de la fiction. Et, le court roman L’enfant dans le taxi le prouve en déplaçant un déni vers une nouvelle ouverture de la généalogie familiale quitte à en inventer tous les paragraphes !
Puis quelques extraits

Le français était venu l’inviter à danser et tous les regards s’étaient froncés en voyant qu’elle acceptait, qu’elle se levait et se mettait sans hésiter à valser dans ses bras, il y avait si longtemps qu’elle n’avait pas dansé ainsi, entre les bras d’un homme qui lui plaisait, dansé sur la musique d’un orchestre qui jouait pour elle, avec dans ses membres et dans son corps la chaleur de plusieurs verres de vin mousseux bus sans compter.
Je sais que de ce plaisir naquit un enfant, qui vit toujours, là-bas, près du lac. Et que ce livre est comme un livre vers lui.
Puisque depuis toujours dans l’ordre des familles le crime c’est de parler, jamais de se taire.
Qui n’est pas d’accord pour convenir que la paix est précieuse, que tous ceux qui la troublent sont toujours des importuns, des inconvenants, des fâcheux.
Le problème n’était-il pas plutôt que la paix soit l’autre nom du déni.
L’autre nom de l’effacement pur et simple de vies.
Les enfants dans la vie ce qu’il faut pour être heureux, c’est des os à ronger.
Ici en bref




Du côté des critiques
Libération – Le Monde – Télérama –
Questions pratiques

Sylvain Prudhomme – L’enfant dans le taxi
X: @EdeMinuit – Instagram : @editionsdeminuit
Parution : 31 août 2023
EAN : 9782707349101
Lecture : Septembre 2023
J’aime beaucoup Sylvain Prudhomme. J’ai assisté à une rencontre avec des détenus, c’est un être d’une grande humanité.
Là, il produit un roman très attachant, tellement hors des sentiers battus du genre . Une écriture que j’aime retrouver aussi
Je ne suis pas sûre non plus que le style me plairait mais l’intrigue : oui. Bonne journée
Il se lit facilement et t’embarque dans cette histoire pas du tout traité comme les habituels du genre.
Bon week-end 😉
je l’ai écouté en parler à Manosque et il m’a tellement donné envie que je suis rentrée avec son lire, je lirais ta chronique après l’avoir lu !
J’imagine, en effet ! J’attends ton avis avec plaisir !
Ce livre ne m’attire pas. Tu es courageuse de lire autant de livres à leur sortie. Bonne journée
Pourtant, Sylvain Prud’homme, même s’il est inclassable, sait mener son intrigue et emmener son lecteur dans son univers.
Je ne supporte pas d’avoir des livres en attente. Je suis un papillon qui aime lire au gré de ses rencontres, de ses envies et de son instinct.
Pour cette rentrée, je me suis efforcée de lire au fur et à mesure, sans me laisser envahir.
Il m’en reste deux, dont déjà, la motivation pour les découvrir s’est émoussée.
Sinon, j’ai noté d’autres que je n’avais pas vu venir et qui m’attire énormément ! Je vais les acheter bientôt.
J’ai hâte de les découvrir et de partager mon ressenti à un rythme plus habituel pour vagabondageautourdesoi.
Très bonne continuation à toi 😉
Un titre étonnant, mais un roman qui va plus loin qu’un simple enfant dans un taxi.
Ah, oui, complètement, on peut faire confiance à cet écrivain mais il ne fautvpas en dire de trop pour ne pas ôter le plaisir de le découvrir.
Bonjour Matatoune,
J’ai parcouru tes billets sur cette rentrée littéraire que je suis un peu de loin : un peu fainéante, j’attends que d’autres lecteurs essuient les plâtres avant de faire mon choix :)!… J’ai eu le malheur de faire une exception avec La foudre de Pierric Bailly, et m’en suis bine mordu les doigts !
J’ai pour l’instant retenu Triste Neige, qui fait une belle unanimité, et j’hésite concernant le dernier Caryl Férey, que j’ai beaucoup lu à ses débuts, mais dont la violence des intrigues, pas toujours justifiée à mon avis, a fini par me lasser…
Merci en tous cas d’avoir lu tous ces titres (je suis épatée !)…
Ingannmic (https://bookin-ingannmic.blogspot.com/)
La Foudre m’attend mais après avoir lu ton billet, pas trop pressée. Certains livres sont ainsi…ils s’éloignent au fur et à mesure que d’autres en parlent. Le Veuiller sur elle me fait aussi cet effet. Mes libraires préférées l’encensent, les blogueurs (euses) aussi, et pourtant quelque chose me retient de ne pas m’y plonger ! Difficile de dire quoi…Peut-être arriverais-je à dépasser mes représentations négatives. Merci d’être passée ici 🙂
Pas sur du tout que ça me plairait mais merci. Bisous bonne semaine
Un très grand roman mais, c’est vrai qu’on ne présente plus Sylvain Prud’homme. Il est devenu un incontournable en littérature.
Très bonne journée 😉