On la trouvait plutôt jolie – Michel Bussi

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Ce titre, Michel Bussi, l’emprunte à Pierre Perret. Sans vouloir faire ma “Rebecca Mansoni” # France Inter (bien sûr très talentueuse et sans comparaison avec moi), je voudrais revenir sur cette chanson :

 

On est en 1977, il y a quarante ans. C’est l’année de l’ouverture de la première ligne de RER, le A, et aussi celle du dernier voyage de l’Orient Express reliant Paris à Istanbul. Côté chanson, c’est l’année où Marie Myriam triomphe à l’Eurovision avec sa chanson “L’oiseau et l’enfant”. De plus, en France, on prend conscience du problème du racisme et de plus en plus de voix s’élèvent contre! Terre d’asile, la France a sont taux d’immigration qui a peu varié depuis le début du siècle. Après les vagues d’immigration européenne, celle magrébine puis africaine  vont venir répondre aux besoins de main d’œuvre des trente glorieuses. Mais, ces populations resteront aux portes des bénéfices qu’apportera la croissance et lorsque la crise viendra, elles seront accusées de tous les maux.

Avec son langage proche du parler, ses 4 strophes de 15 vers et la dernière à 10, et en l’absence de refrain, “On la trouvait plutôt jolie” deviendra rapidement une chanson populaire ! De plus, Lily ressemble à tout le monde tant la description est vague. On sait uniquement d’elle qu’…! Dans cette chanson, Perret  dénonce les préjugés, la discrimination et bien sûr le racisme. Lily, elle-même, évolue : de la petite naïve, elle se révolte contre le racisme.  Perret espère la prise de conscience de chacun.

Pierre Perret dit avoir passé 10 ans à tenter d’écrire cette chanson. Mais, cela valait la peine :  C’est le plus beau plaidoyer anti-racisme de la chanson française!

Michel Bussi reprend le titre de cette chanson pour en faire un roman policier sur fond d’immigration, de séparation des familles, d’exploitation à tous les niveaux, de corruption, de misère et de souffrance. Difficile d’en faire la critique détaillée sans trahir le retournement de fin dont il nous a habitué au fil de ses autres romans !

Sans pareil pour entremêler ses personnages, pour reprendre les situations en apportant un élément de compréhension essentielle, pour construire en chapitres courts une intrigue, il a bâti son livre autour de quatre jours et nuits : Jour de peine, nuit de chouette, jour de sang, nuit d’ancre (nuit d’encre), jour de vent (jour devant), nuit de boue (nuit debout), jour de pierre, le tout, ponctué par le récit de Leyli sur son parcours raconté comme une histoire pour endormir les enfants sages. Fable ou vérité, je me suis interrogée jusqu’à la fin!

Pour l’auteur, Leyli incarne la figure familière de la mère courage qui fait tout pour ses mômes, mais jusqu’où… car très vite  le doute s’installe: Le meurtrier est rapidement identifié mais quel secret cache cette femme et quel rapport entretient-elle avec le(s) crime(s) ? Des indices sont laissés comme des cailloux, par exemple l’hôpital Avicenne à Marseille. Étonnant! Mais, le lecteur oublie vite car Michel Bussi sème ses réflexions, ses connaissances des flux migratoires et souligne les aberrations de nos politiques d’immigration… Le polar deviendrait-il pamphlet gauchiste! Non, bien sûr, mais le mélange permet à l’auteur de mieux nous manipuler. En tout cas, les citations que j’ai relevées, sont d’une clairvoyance sur notre monde contemporain que l’on retrouve la sensibilité de l’ex- chercheur!

Après avoir lu “Mourir sur Seine”, “Le temps est assassin”, “Maman a tord” et “N’oubliez jamais”, je reste extrêmement étonnée de la façon qu’à Michel Bussi de nous entraîner dans des univers différents mais réalistes où le suspens est au rendez-vous et cet opus est tout aussi bon que les précédents et même par certains points meilleur ! A recommander sans hésiter!

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Il enfoncerait le clou en précisant que le nombre actuel de migrants sur la planète était stable depuis de nombreuses années, environ 3% de la population mondiale, soit trois fois moins qu’au XIX siècle.Un paradoxe dans une société mondialisée, où tout circule bien plus vite et plus loin qu’aux siècles derniers l’argent, l’information, l’énergie, la culture. Tout. Tout sauf les hommes. Sauf la majorité vers hommes. Les démocraties construisent des murs.Une véritable contagion depuis le 11 septembre.Des murs non pas pour se barricader, mais pour filtrer.

 

Mais puisque vous avez tant voyagé, vous devez bien comprendre que je ne dis pas la seule , qu’il existe dans le monde des milliers et des milliers de mamans qui ne se résignent pas, en Afrique et ailleurs, des mamans qui ont ressenti la même urgence que moi, qui ont accepté le même sacrifice. Laisser leur enfant pour !ui offrir La chance d’une vie meilleure. Même pas d’une vie meilleure. D’une autre vie, tout simplement.Leur offrir une seconde fois la vie.

 

( le passeport) Les hommes avaient inventé ce morceau de papier qu’à l’occasion de la Première Guerre mondiale, en s’engageant à le supprimer sitôt la paix revenue.

 

N’est-ce- pas délicieusement combiné, Leyli? Refuser à nos familles le droit de vivre ensemble, au prétexte qu’elles mériteraient un confort qu’elles n’ont jamais connu ; un confort qu’elles n’espèrent même pas?

 

Les devantures grises servaient d’ardoise pour tous les tagueurs du quartier.

 

L’homo-megapolitas aura toujours besoin de nous pour faire les 3D, comme disent les Américains, dirty, dangerous, full. Qui pourrait nous remplacer ? Qui en aurait envie, du moment que nous sommes invisibles ?

 

N’est-ce- pas délicieusement combiné, Leyli? Refuser à nos familles le droit de vivre ensemble, au prétexte qu’elles mériteraient un confort qu’elles n’ont jamais connu ; un confort qu’elles n’espèrent même pas?

 

Plus notre folie imagine des risques absurdes et plus notre raison invente des normes pour qu’ils ne se produisent jamais.

 

La faute aux embouteillages qu’elle n’avait pas anticipés, au bus qui se traîne dans une agglomération où tous les bureaux ferment en même temps, comme si non seulement on obligeait les gens à habiter et travailler dans les mêmes villes géantes, mais on leur imposait en plus de sortir et rentrer tous à la même heure.

 

Le devoir de la France est d’accueillir les réfugiés, mais la consigne est de ne pas les laisser entrer ! Du moins ceux qui n’ont pas de papiers, mais comme c’est rare que les dictateurs tamponnent leurs visas ou qu’ils trouvent une photocopieuse en état de marche dans les villes bombardées, ils doivent risquer leur peau pour passer illégalement. Mais, une fois qu’ils ont posé un pied chez nous, jackpot, ils sont sauvés.

 

Les réfugiés sont les gentils, ils fuient la guerre dans leur pays, on doit avoir pitié d’eux, on a le devoir moral de les accueillir, la France est une terre d’asile. Les migrants, eux, ce sont les méchants, ils veulent nous envahit, ils sont seulement pauvres, mais des pauvres, on en a déjà assez chez nous. Tu comprends ?

 

C’est le principe, petit. Ils mettent des semaines, des mois à arriver, en déployant une ruse et une énergie qu’on ne peut pas imaginer, pour qu’une fois sur place, on les renvoie par le premier charter venu. Cinq heures de vol et ils sont de retour à la maison. C’est pour ça que même si c’est usant, répétitif, une bagarre sans fin, les migrants ne gagneront jamais contre les pays barricadés. Parce-que même s’ils s’entassent par dizaines dans les camions, par centaines dans des bateaux, on met mille fois moins de temps à les renvoyer chez eux qu’ils ne mettent pour venir. Comme des fourmis qui reviennent sans cesse dans le placard à biscuits. Un coup d’éponge, une fois de temps en temps, et on les oublié. Attention, je te parle des migrants là, pas des réfugiés.

 

Elle avait fini par ranger les petits chefs en quatre catégories, du moins au plus dangereux. Les vrais gentils serviles, mielleux,qui appliquaient avec une obsession fébrile même les pires règlements en vous expliquant qu’ils n’y étaient pour rien. Les vrais méchants, embauchés pour cela et qui ne se cachaient pas. Les faux gentils, compréhensibles, arrangeants, collants, ceux qui faisaient copain- copain pour mieux masquer leur incompétence et finissaient par vous sacrifier pour mieux se protéger. Et pire que tout, les faux méchants, ceux quine voyaient même pas le mal, ceux qui se prenaient au sérieux, qui se croyaient juste et impartiaux, comme de petits apprentis dieux espérant chaque matin qu’on leur confie une galaxie un peu plus grande.

 

Quand on habite vingt-cinq mètres carrés, la musique est le seul moyen d’agrandir les pièces.

 

… réputation de dur à cuire et de pur en cuir.

 

 

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