Un outil de communication d’un autre âge (de simples cartes postales) et une phrase énigmatique et anonyme au dos vont ouvrir des pans entiers de souvenirs, qui, petit à petit, reconstruisent l’adolescence d’un homme quinquagénaire.
Jeff Valdera redécouvre ce tout jeune homme qu’il était lorsque, avec sa tante, il séjournait, plusieurs étés de suite, dans un hôtel familial pour habitués en Suisse. Parfums surannés, ennuis des après-midi au milieu de tourismes vieillissants, parties de go et d’échec pour se divertir et en prime, la découverte de l’écrivain Thomas Mann avec une veille dame pas tout à fait “dentelles et arsenic” mais presque !
Êtes-vous sûr de supporter l’adolescent(e) que vous étiez à seize ans ? Êtes-vous surs de retrouver sa particularité, ses émotions mais aussi ses travers ? C’est l’aventure que nous offre François Vallero qui situe son roman au milieu des années 70, dans les Alpes Suisses, à Davos, à quelques kilomètres de la RDA en pleine guerre froide bien avant la chute du mur de Berlin…
La recherche que mène Frieda Steigl, l’auteure des cartes postales, va confronter cet homme à sa mémoire. Souhaitant retrouver la trace de son père disparu, précédemment enfoui de RDA et dont l’existence s’arrête dans cet hôtel de façon mystérieuse, elle mène une enquête à charge. Elle l’accuse de ne pas reconnaître son implication dans des événements lourds de conséquences.
Puis, elle finit par lui révéler ses sources : les archives de la Stasi, qu’elle a minutieusement analysées. Au fil de ses découvertes, elle trouve fréquemment écrit le nom de cet adolescent qui, adulte, nie toute implication.
Cette tension fait naître l’intrigue où l’un ne prétend pas être celui que décrit l’autre. Même si acceptant déformations, oublis et émotions, Jeff Valdera s’interroge sur sa responsabilité troublé par la force de persuasion de cette femme et son charme certain.
Entre attirance et répulsion, François Vallejo nous emmène avec brio dans un huit clos d’un monde de dupes où tous les personnages sont troubles et doubles, où celui qui sait n’est pas celui qui saura et où chacun évolue avec ses certitudes, ses doutes et ses apriori.
Au cœur de manipulations complexes, consenties et acceptées, ce roman nous promène sur les chemins de la mémoire, de l’adolescence et d’un monde disparu avec en filigrane la quête de son identité.
Dire que je me suis reproché de me conduire comme un voyeur, alors que je n’ai rien vu du tout, rien saisi de leur véritable relation. Voyeur aveugle, c’est tout moi. Et fouteur de bordel, encore mieux.
Elle est d’une famille d’historiens, elle doit pratiquer la critique des sources, surtout si les sources sont réputées pour leurs mensonges d’État, comme l’était la Stasi.
Cette mémoire parallèle bouffe la mienne, comme si une moitié de mon cerveau était remplacée par une machine à souvenir totalitaire. Ça en devient oppressant.
Vraiment ce qu’elle pensait : ce que je raconte n’est jamais ce que je crois, ce que j’accepte de montrer révèle de mieux en mieux ce que je cherche a cacher.
Si on n’est pas gourmand à quatre-vingt cinq ans, ça ne vaut pas la peine de durer. Et si on ne l’est pas à seize ans, on ne le seras jamais, ça ne vaut pas la peine de commencer.
Nous avons vécu la même histoire et une autre, est-ce possible ? Ou alors, c’est toute notre vie qui est comme ça, on se goure jour après jour sur ce qu’on croit vivre, la plupart du temps sans s’en apercevoir. Quelquefois, ça bascule, comme aujourd’hui.
Ce que des archives assurent que j’ai fait, je l’aurais vraiment fait, puis totalement effacé, une amnésie inconsciente mais efficace. Si j’y pense les creux de remplissent malgré la résistance. Comme l’impression de revoir des scènes, même celles que je n’aie, d’éprouver physiquement ce qu’elle m’a donné a lire et a entendre.
Il n’y a pas que les papiers des archives qui ont été déchiquetés, des vues aussi, et personne n’a mis au point un logiciel capable de reconstituer aussi facilement que des bouts de papier des vies en morceaux.
– Pas si vite, ce que voit un témoin, ce qu’il croit voir, n’est pas toujours ce qu’il devrait comprendre.
En m’en prenant a des documents écrits, je m’en prends à son intimité.
C’est la preuve que vous croyez enfin a la fiction, vous avez peur qu’elle ne se reproduise et vous fasse vivre la même expérience. Le talent commence à entrer en vous.
Parce que seuls ceux qui mettent la pagaille quelque part ont les moyens d’y mettre fin, s’ils sont honnêtes.
Hôtel Waldheim – François Vallejo
ISBN : 9782878589882
Parution: Août 2018
Éditeur Viviane Hamy
Lecture : Novembre 2018
Il est sur ma liste.
Je note, j’aime bien cette ambiance huis clos et le côté manipulations sans oublier les thématiques abordées…
Avis à venir donc ! Bon WE
Etrange retour sur le passé…..Bisous
Sur un passé proche, surtout! Très bonne soirée !
C’est un auteur que je n’ai pas encore lu. Alors pourquoi pas commencer avec ce titre.
Pourquoi pas en effet ! Alors à suivre !
encore une tentation en perspective 🙂 le thème me plaît…
Belle tentation !
Ha, fouiller le passé ne fait pas plaisir à tout le monde. L’oubli permet parfois de vivre. En tout cas, une intrigue qui semble bien palpitante !
Non, plutôt difficile de revenir dans le passé ! Tout à fait !
Bonjour Matatoune. Le sujet est original et ton ressenti me donne envie de le lire. Bonne journée
Ravie ! Bonne soirée!
Une belle lecture pour toi alors !
Oui, tout à fait !