
Enquêter avec Le ciel est immense sur un oncle oublié, dans les non-dits de sa famille, c’est le thème du second roman de Feurat Alani. Ce roman est le récit d’histoire d’amour contrecarrée par le déterminisme social et les enjeux politiques mondiaux, qui poussent l’amoureux au-delà de lui-même. « Quand il neigera à Bagdad », sorte de ritournelle pour accepter qu’on ne puisse changer les choses en Irak.
Adel Al-Joumaily est cet oncle, avec la fierté dans le regard à poser devant son MiG -21. Cet avion supersonique est soviétique. Seulement, au courage qu’il faut pour affronter le ciel et ses dangers, Adel devait faire face à des forces qu’il ne peut maîtriser. Comme un pion au milieu des tensions géopolitiques mondiales. Nommer capitaine après la guerre des Six Jours, il est envoyé à Krasnodar en URSS pour, à terme, faire partie de la garde présidentielle irakienne.
À partir de l’enquête que Tamouk mène avec sa mère, sur les rapports de sa grand-mère, Bibi Nahda, et de son fils, des pans entiers de l’histoire de l’Irak sont révélés. Tamouk a vécu devant la photographie silencieuse de cet oncle que sa grand-mère lui avait présenté. Elle l’obsède depuis plus de vingt ans jusqu’au moment où il contacte l’émission Perdu de vue Russe.
Jusqu’où un homme peut-il aller pour suivre son idéal ? Jusqu’à quand accepter le carcan social, mais aussi politique sans se rebeller ? Le poids des coutumes, des traditions et des attentes familiales peut-il empêcher de vivre son amour ? Ce sont, en partie, les questions suggérées par cet écrit.
Le ciel est immense interroge aussi sur la légitimité de telles recherches. Lorsque le silence est un pansement sur des plaies non refermées, a-t-on le droit de le lever ? Pourtant, comme le souligne la grand-mère de Tamouk, vient le temps qui désigne un témoin qui tentera de le lever.
Ses doutes, ses interrogations, le héros les partage avec justesse. Le prologue est extrêmement exact dans la description du secret, du choix des non-dits et des conséquences sur la famille.
La photographie du héros près de son avion de combat est brouillée. Normalement, il devrait être célébré. Ainsi, c’est aussi le silence de l’armée qu’il faut interroger !
Le ciel est immense n’est pas une énième enquête sur la filiation et les non-dits d’une famille. Feurat Alani fait preuve de talent pour embobiner son lecteur de ses précieuses confidences distillées savamment au fil des pages. L’émotion est au rendez-vous, surtout à la fin, où l’imagination peut se déployer. Un écrit d’une très grande qualité !
Puis quelques extraits

De son côté, le régime iranien redouté par-dessus toute la défection d’un de ces pilotes. Israël, conscient de l’importance stratégique du MiG-21, multipliait les tentatives d’en dévoiler les secrets. Au-delà d’assurer la défense du pays, ces renseignements constituent une monnaie d’échange avec les États-Unis, qui recevaient ainsi des informations de premier plan sur la présence soviétique au Moyen-Orient. En retour, Washington fournissait à Tel-Aviv des technologies militaires de pointe, qu’autrement, elle aurait refusé de partager.
Désormais, grâce à la défection d’un seul homme, l’occident avait accès au MiG-21, l’un des avions de chasse les plus novateurs de l’union soviétique.
Un ami architecte n’avait appris que ces chemins de traverse étaient appelés « des lignes de désir », tracées par les pas de ceux qui refusaient du marché là où on leur disait d’aller, telle une géographie de résistance. Alors que les allées balisées s’étiraient en courbes sages, les lignes de désir préféraient filer droit, faisant fi des clôtures et des détours imposés.
– Ce n’est pas un simple choix de carrière, répondit-il, c’est une issue. Une façon d’échapper au mur qu’on a dressé devant moi, aux coups d’œil condescendants qu’on me lance. Là-haut, on ne pourra plus m’ignorer.
Et, encore
À chaque fédération, chacun compose avec ce qu’il reçoit, choisit-il ou non de s’approprier. Mais, cette liberté est-elle aussi grande ? Sommes-nous les véritables auteurs de notre identité, ou bien sommes-nous reliés par des fils invisibles à ceux qui nous ont précédés, même lorsque nous croyons nous en détacher ?
Si je pouvais parler à cet enfant, je lui dirais que la vérité est encore plus insolente que son imagination. Je lui dirais qu’il lui avait fallu du courage pour suivre ses souterrains qui menait à l’autel familial, à ce mythe auquel on ne devait pas toucher.
Je lui dirai aussi qu’avec le temps le secret était devenu un monticule de sable autour duquel la famille s’était soudée tant bien que mal.
C’est fragile un monticule de sable. Ça s’effrite.
Lorsqu’on se méfiait de vous, on ne se contentait pas de vous surveiller : on vous forçait à devenir un rouage du système. La dictature, c’était aussi ça.
La générosité était un terrain de rivalités. Il fallait être celui qui sacrifierait le plus de moutons pour ses invités. On jugeait les familles là-dessus.
Depuis son plus beau jeune âge, elle avait appris à tirer avantage d’un système avec lequel tous se négociaient dans l’ombre des administrations ou celle des cafés bondés.
Ici en bref




Du côté des critiques : Libération
Du côté des blogs Julitlesmots – JoelleBooks
Questions pratiques

Feurat Alani – Le ciel est immense
Rentrée littéraire 2025
Prix Le Mans Antoine de Saint-Exupéry
Éditions JC Lattès X : @editionsLattes – Instagram/ TikTok : @editionsjclattes – Facebook
Parution : 20 août 2025 – EAN : 9782709674249 – Lecture : Septembre 2025

Cette thématique familiale ne m’attire guère. Bonne semaine
Oui je sais! Seulement, celui-ci pourrait te plaire avec son sens de la naration et l’implication politique qui suggère ! Bonne continuation 📚
Bonjour Matatoune. Malgré ta critique élogieuse, je ne cois pas que je le lirai. Bonne journée
Oui, je comprends. Néanmoins, il rapporte des éléments politiques intéressants et son art de la narration est bien développé !
Bonne continuation 📚🌞
Un récit qui a l’air d’une grande force. ll m’éloigne de mes habitudes de lecture mais je le note.
C’est un grand récit très littéraire ! J’ai hâte de lire ton retour 🌞
Je me laisserai bien tenter, à l’occasion.
Je pense qu’il pourrait te plaire 🌞
Merci pour la mention du blog 😉 Très bel avis ! Une très belle lecture aussi.
Merci à toi ! Oui une belle œuvre littéraire ! 🌞
pas sûre du tout, mais pas à cause de ta critique élogieuse. Juste envie de m’évader davantage.
Ah je comprends ! Ma PAL n’est jamais très grande, à peine une dizaine de livres qui me reste de la rentrée littéraire. Mais là, j’ai hâte d’arriver au bout et de prendre un vrai polar 😄
Je l’avais repéré et des avis négatifs m’en avaient détournée… mais pourquoi pas du coup 🙂
Si tu as l’occasion, n’hésite pas, c’est un très bon livre 🙂
J’ai bcp aimé ce récit bien travaillé litterairement ! A voir, peut-être !