Fred Vargas – Sur la dalle

Dernière sélection du Prix Roman Renaudot

vagabondageautourdesoi.com - Fred Vargas - Fred Vargas revient après six ans d’absence avec son commissaire atypique, Adamsberg, dans un nouveau polar Sur la dalle, en pleine patrie du romantisme, au cœur de l’âme d’un dolmen, au pays de puces devenant, malgré elles, preuves à conviction d’une enquête où le(s) meurtrier(s) sera(ont) flatté(s) d’être arrêté par le « pelleteux de nuages ».

Brins d’histoire

En période de canicule plutôt anormale, Adamsberg est préoccupé par une scène presque de crime qui aurait pu mal virer, celle d’un hérisson qu’il s’empresse de vouloir sauver. En même temps, il est attiré par un article dans le journal local de Combourg où quelques semaines plus tôt il avait été amené à résoudre une enquête de tueur en série longtemps non élucidée.

Car, un énième soir de beuverie, le garde champêtre, Gaëlle Kévin, est retrouvé assassiné dans les rues de Louviec, petit village près du château de Combourg.

Puis, c’est Anaëlle Briand, jeune femme d’une trentaine d’années retrouvée, elle aussi poignardée. Elle animait avec sa cousine un magasin d’électroménager et était aimée de tous dans le village.

Tout semble accusé le Vicomte du lieu, Josselin, sosie de son ascendant célèbre, François-René de Chateaubriant du château de Combourg.

Ni une, ni deux, à la demande du ministère, Adamsberg quitte son 13ème arrondissement en abandonnant Danglard pour retrouver Franck Matthieu, commissaire de Rennes délégué sur Combourg avec qui il a déjà travaillé.

Une phrase incompréhensible de mourants, des ombres sur lesquelles il ne faut pas marcher sauf à vouloir du mal à son propriétaire, un étrange fantôme avec sa jambe en bois qui arpente les rues le soir venu, et surtout, Joachim, la copie conforme, que tout accuse, c’est une enquête bien alambiquée comme on les aime chez Fred Vargas !

Et, voilà des flics expérimentés de Paris obligés de faire du porte à porte pour trouver le propriétaire de puces dont les piqûres couvrent les cadavres !

Polar étrange et réaliste à la fois

Seule Fred Vargas est capable de balader son lecteur de cette manière et de l’imprégner d’un univers aussi onirique que décalé.

Adamsberg est toujours entouré de ses fidèles lieutenants : Rétancourt avec son physique improbable et son prénom si tendre, Veyrenc au buste romain, le seul a appelé le commissaire par son prénom, petit souvenir de leur enfance partagée, Mercadet, aux doigts si agiles pour craquer les verrous informatiques mais aussi au sommeil impérieux, etc.

Seulement, sans rien abandonné de son univers, Fred Vargas propose un polar certes étrange mais plus ancré dans une fiction crédible.

Écolo anxieuse, Fred Vargas, archéologiste de renom, ne change rien de ses alertes concernant la planète. Dès le début, l’écrivaine signale la chaleur excessive au mois d’avril. Et à l’heure où l’on sait que le futur ne sera pas meilleur que le présent, que le progrès n’amènera pas forcément le mieux pour l’homme, il n’est plus temps de raconter des balivernes ! La réalité est à prendre en compte…C’est ce que fait Fred Vargas !

Alors, pour continuer à combattre les brutalités du monde, Fred Vargas confronte  le raisonnable Matthieu à l’évanescent Adamsberg et transforme ses polars oniriques mais improbables en une enquête complexe et réaliste néanmoins décalée. Et la confrontation devient savoureuse !

Car Adamsberg garde sa personnalité : un homme réfléchi même s’il ne comprend pas tous les méandres de ses pensées, terriblement encombré par les bulles qui l’assaillent, embarrassé par un trouble du langage qui le pousse à faire des contractions inconnues des dictionnaires, doutant de ses propres facultés avec son expression favorite « je ne sais pas  » et maladivement sensible. Homme de fraternité, il aime les différences, sait les accommoder pour mieux les révéler. Et, c’est avec sa diversité et celle de son équipe qu’il réussit à conclure ses enquêtes.

Même si la fantaisie d’Adamsberg le séduit, quelques fois, Matthieu en est énervé. Car ce dernier est un rationnel, carré avec ses interrogatoires et procédures parfaitement construites, assurant la logistique et l’archivage des preuves. Sans lui, pas de procédure à présenter à la justice !

En conclusion,

De cet équilibre délicat, Fred Vargas tire toute la force de ce nouveau polar ! Elle abandonne les rivages improbables de ses enquêtes commencées au siècle dernier pour immerger son commissaire, Adamsberg, et les membres de son équipe dans le combat de la brutalité de notre quotidien sans rien enlever de leurs personnalités. Une prouesse qu’il faut saluer !

Puis quelques extraits

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Adamsberg souriait. Qu’on le considère comme étrange – encore qu’il n’ait jamais bien compris pourquoi – ne le gênait en rien, mais croiser sur sa route d’autres dérèglements manifestes lui plaisait. Au moins n’était-il pas seul à « pelleter des nuages », et l’hirondelle de Johan était bel et bien un nuage. Que l’aubergiste pelletait avec assiduité.

Danger dont Adamsberg ne se souciait en rien, persistant de sorte à venir à pied depuis chez lui jusqu’à la Brigade, tant il était habitué par sa nonchalance innée, semblant souvent toucher à de la négligence, voire de l’indifférence, particularité de sa nature qui, si blindés que furent ses équipiers, les désorientés ou parfois les exaspérés, tout en laissant nombre de ses succès inexpliqués.

Il est vrai que le temps des canicules était encore loin mais que depuis une semaine, le thermomètre battait des records qui n’auguraient rien de bon pour l’avenir.

– parce que Chateaubriand, novateur, devancier du romantisme, styliste grandiose, est une gloire nationale, reconnue à travers le monde, s’emballa Danglard… depuis le Canada jusqu’au Japon, le Brésil jusqu’à la Russie.

Combien de fois avait-il dû les dire, ces phrases toutes faites, face à un regard noyé dans les lointains de l’indifférence ?

Vous croyez qu’une fois, une seule fois depuis que je suis môme, on m’a appelé par mon nom ? À part les parents et les profs ? Et le maire ? Non, « le Bossu », je n’avais pas d’autre nom.

La Bretagne, ce pays des rébellions éternelles et des répressions impossibles.

Et encore

Il connaissait sa réputation, ce qu’on lui reprochait comme ce qu’on admirait, le désordre de sa logique, les sentiers sinueux et inusités qu’il empruntait, ses cheminements qui pouvaient demeurer des énigmes, le respect voire le culte qu’il suscitait, ou bien l’antipathie, le rejet. On aurait pu tout autant le traiter de flemmard que de génie.

Toute prétention est laide.

(…) l’attente est une des armes de la domination (…) .

Quand aux gardes, ils doivent crever de chaud, la journée a encore été lourde. Paraît que ça va flotter demain. 

Ici en bref

D'habitude, je ne partage pas mes lectures lorsqu'elles ne m'ont pas plue ! Mais, là, c'est le livre qui se vend à plus

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Incipit
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Un extrait
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Puis le dernier

Du côté des critiques

Le Monde

Questions pratiques

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Quatrième de couverture

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Éditeur : Flammarion

Twitter : @Ed_Flammarion   Instagram : @flammarionlivres

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Parution : 17 mai 2023

EAN : 9782080420503

Lecture : Mai 2023

Littérature contemporaine

Romans policiers

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Chroniques littéraires

25 commentaires

  1. Bonjour Matatoune. Oui ce Fred Vargas n’est plus tout à fait dans la même verve que celle de ses précédents polars. On y retrouve certes plusieurs personnages des dernières enquêtes mais le ton n’est plus le même. Il lui manque ce peps et ce grain de folie qui faisaient qu’on savait qu’on lisait un Vargas. Longtemps ça a été ma chouchoute en romans policiers français parce que justement, il n’y avait qu’elle pour nous emporter dans de drôles de théories, théories qui étaient drôlement bien mixturées entre elles. Pourvu qu’elle retrouve une profonde envie d’écrire ce type de livres (et pas seulement sur l’écologie).
    Agnès. Strasbourg (alias aa67 sur Bébelio)

    • Tout d’abord, ravie de te recevoir ici. Oui, son style est moins « foutraque » ou moins magique. Mais, j’avoue que cet aspect me convient bien. Est-ce l’effet pandémie, inquiétude climatique, etc. Je n’aurais pas apprécié trop de son ancien style. Six ans qu’elle n’avait pas publié. C’est un excellent cadeau qu’elle nous fait, d’avoir su, à mon avis, faire évoluer son intrigue tout en gardant ses personnages et leurs caractéristiques passées. Au plaisir d’échanger encore et encore nos impressions livresques !

    • Je comprends. Pour ma part, je n’avais plus envie d’être plongée dans un monde complètement onirique de ces précédents et ce changement m’a plu!

    • Les avis semblent un peu mitigés, mais moi, au contraire, je le trouve très réussi ! Au plaisir de lire votre avis 🙂

  2. Je ne suis pas amatrice de ce genre littéraire mais ce polar a l’air très bien ! En plus, Fred Vargas est une autrice phare de ce genre. Bonne journée Matatoune 🙂

    • Comment te répondre sans en dire plus ! J’ai aimé ces premiers, puis j’ai trouvé avec Pars vite et revient qu’un virage était pris vers plus de réalisme et j’avais aimé. Là, c’est un vrai changement, qui peut ne plus plaire à certains, mais que je trouve courageux tout en conservant l’essence même de son personnage.

  3. Je pense que je vais le recevoir pour mon anniversaire dans les prochains jour..tellement hâte de retrouver Fred Vargas ! Je lirai ta chronique après ma lecture 😉Belle journée !

  4. Chic alors, Fred et jean-baptiste sont de retour, ils m’ont trop manqué ! Désolée, je n’ai pas lu le résumé, une histoire de Vargas, ça se lit les 👁️‍🗨️ fermés. Merci pour cette bonne nouvelle

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