Niko Tackian – La lisière

vagabondageautourdesoi.com - Niko Talkian - Immergé au cœur du Finistère dans les Monts d’Arrée, baignés par les légendes de l’Ankou, le polar La lisière de Niko Tackian s’attache à mettre en scène les frontières perméables entre le rêve et la réalité dans le processus de deuil.

Vivian et Hadrien vont déposer leur fils chez sa grand-mère paternelle pour quelques jours de vacances. Sur la route départementale 785 au milieu de la soirée, une bête traverse brusquement la route obligeant Hadrien a se garer afin de se rendre compte des dégâts sur sa voiture. Leur fils Tom, à l’arrière jusque-là absorbé par son jeu vidéo, décide de sortir pour soulager un besoin pressant.

Ce seront les dernières images que conservera Vivian de  son mari et de son fils, vivants.

Assaillie par une présence indéfinissable en cherchant les êtres qui lui sont les plus chers, Vivian est recueillie par un camionneur qui la déposera à la gendarmerie la plus proche. C’est la commandante Maëlys Mons qui dirige l’enquête, une première depuis son affectation sur Carhaix.

En plus de l’enquête officielle, Vivian trouve un mot dans sa boîte aux lettres qui n’avait pas été relevée depuis longtemps, signé Lorie demandant d’être rappelée. Mais, il n’y a jamais personne au bout du fil.

Dès le chapitre 4, un gamin Ron, sous l’emprise de la drogue, constate que son chien Vulcain présente du sang sur lui…

La méthode de Niko Tackian est redoutable : des chapitres de cinq pages maximum posent ses situations en un minimum de mots. De plus, un détail permet la transition avec le chapitre suivant. Tout est fait pour que les pages se tournent sans s’en rendre compte. Son écriture ramassée produit des visuels frappants de réalisme.

Le propos de Niko Tackian n’a pas de visée trop sociale. Et, pourtant, il y aurait à dire sur les conserveries de poissons, l’odeur écœurante, les cadences, le turn-over et le bruit. L’écrivain les illustre par les photographies délicates de Vivian mais ne s’y arrête guère.

Ce que Niko Tackian détaille dans son roman policier ce sont les processus du cerveau lorsque, traumatisé par le deuil tragique d’êtres chers, il doit composer avec le manque et l’absence. L’aide de la psychiatre, Eva Blair, permet à Vivian de décoder son besoin de réconfort avec les hallucinations qu’elle ressent. Cette relation s’insère parfaitement à cette enquête qui bien sûr, saura complètement subjuguer son lecteur.

Une nouvelle fois, avec La lisière, Niko Talkian réussit un thriller très réussi au cœur des légendes bretonnes.

Puis quelques extraits

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Quoi que tu entendes, ne détourne pas la tête. Il y va de ta vie dans ce monde, et de ton salut dans l’autre.

« Tu sais, Ron, on n’utilise jamais la même drogue que son père, c’est pour ça que tu te calmes. »

Utiliser le visage des autres pour explorer son âme, c’est ainsi qu’elle s’exprimait.

Utiliser le visage des autres pour explorer son âme, c’est ainsi qu’elle s’exprimait.

La peur lui a donné l’ordre ( au cerveau) de se mobiliser pour éviter que la situation ne se reproduise. Il va donc graver dans le marbre ce traumatisme en vous faisant croire à chaque instant que votre vie est en danger.

Dieu s’il existait venait de souffler sa bougie.

Ici comme dans bien des secteurs des métiers de la mer, la main d’œuvre vieillissait et les mareyeurs peinaient à recruter pour un boulot difficile et peu valorisé qui autrefois s’enseignait « sur le tas ».

Il faut imaginer le travail de la psychanalyse comme un chantier archéologique. On doit déblayer couché par couche en prenant garde de préserver l’essentiel.

Lorsqu’on vous demande de raconter vos rêves, ce n’est pas le contenu qui est important. C’est la manière dont vous en parlez.

Ici en bref

D'habitude, je ne partage pas mes lectures lorsqu'elles ne m'ont pas plue ! Mais, là, c'est le livre qui se vend à plus

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Incipit
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Un extrait
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Puis le dernier

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Questions pratiques

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Niko Tackian – La lisière

Éditeur : Éditions Calmann-Lévy  

Twitter :  @calmann_levy  Instagram : @calmann.levy

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Parution : 1 mars 2023

EAN : 9782702184004

Lecture : Mars 2023

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12 commentaires

  1. Franchement j’ai trouvé cette psychiatre assez bizarre, une fois elle dit que le traumatisme amène un processus d’oubli, une fois elle dit qu’il fait revivre la scène traumatique, va savoir.
    En plus ces états lisières mêlant réalité et rêve tiennent bien de l’hallucination, et ces états ne collent pas à la personnalité de Vivian.

    • Ah, ton avis est fort! J’avoue être moins cartésienne … Je me laisse embarquer par une histoire,. Pour moi ce sont des hallucinations produites pour étancher quelque peu la souffrance et accepter l’absence. Pour d’autres, ce seront des phénomènes paranormaux…
      En tout cas. le traumatisme est une réaction protectrice du cerveau, à mon avis, au départ d’oubli pour dissocier douleur et réalité et les mots qu’on peut trouver pour le qualifier vont lever cette réaction et permettre de revivre la situation traumatique pour mieux la dépasser…
      Non, ce qui m’a le plus étonnée. et que j’ai trouvé peu plausible, c’est la proximité de cette psy avec l’enquêtrice et le fait qu’elle ne respecte pas trop le secret thérapeutique. Et trop grande proximité aussi avec sa patiente, on dirait une coach psy sportive 😄

    • Non, c’est l’éditeur qui parle de fantastique. Mais, franchement, je pense que lorsqu’on est confronté à l’épreuve du deuil, on se refait le film des souvenirs ce qui est juste une adaptation du cerveau au manque et non des hallucinations… En tout cas, bonne fin de dimanche !

    • Oui, l’éditeur le vend de cette façon. Moi, ce n’est pas ce qui m’a le plus emballée 🙂 Bon week-end !

    • A la fois, je trouve que son procédé (style imagé, chapitres courts) est un peu attendu, mais à chaque fois, je constate que sa façon de traiter ses intrigues est assez inhabituelle. Ici, composer autour des connaissances neurologiques actuelles pour aider à appréhender le processus du deuil est sacrément peu commun dans l’univers du polar français. C’est donc une plume qui sait à la fois se diversifier et être singulière !

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