Pour fêter la Saint-Valentin sur ce blog, un article en forme de clin d’œil sur les amours devenues épistolaires avec la prêtresse du féminisme, Simone de Beauvoir et son amour fou du moment, Nelson Algren, un journaliste et romancier américain.
Brins d’histoire
Simone décide de visiter les Etats-Unis en 1947, en même temps qu’on l’invite pour une série de conférences. C’est l’après-guerre, toutes les restrictions ne sont pas levées à Paris et pourtant, la vie artistique retrouve son fol enthousiasme. De plus, depuis l’âge de dix ans, elle passe presque entièrement ses matinées à écrire des lettres.
Simone de Beaucoir visite New-York puis une amie décide de lui recommander un guide particulier pour visiter Chigago, le fameux Nelson Algren, qui n’a pas encore connu le succès avec L’Homme au bras d’or.
Il a suffi d’une soirée et d’une après-midi pour sceller un amour qui durera jusqu’en 1964. Nelson Algren lui parle de ses petits boulots, de sa fréquentation des exclus, des sans-grade, etc. Simone de Beauvoir fera quelques allers-retours, mais repart pour la France. Lui, il espère qu’elle serait restée ou revenue.
Je ne suis pas triste. Assommée, plutôt, très loin de moi-même, incapable de croire vraiment que désormais vous serez si loin, si loin, vous qui étiez si proche. Avant de partir, je veux vous dire deux choses seulement, après je n’en parlerai plus jamais, promis. La première, c’est mon espoir de vous revoir un jour. Je le veux, j’en ai besoin. Cependant, souvenez-vous, je vous en prie, que jamais je ne demanderai à vous voir, pas par fierté, avec vous, je n’en ai pas, vous le savez, mais parce que notre rencontre n’aura de sens que si vous la souhaitez. J’attendrai donc. Quand vous le souhaiterez, dites-le. Je n’en conclurai pas que vous avez recommencé à m’aimer, pas même que vous désiriez coucher avec moi, nous ne serons nullement obligés de rester ensemble longtemps – juste quand et autant que vous en aurez envie. Sachez que moi je désirerai toujours que vous me le demandiez. Lettres à Nelson Algren
Simone de Beauvoir a conservé les lettres d’Algren. Elles sont au nombre de 304. Sa fille adoptive, Sylvie Le Bon de Beauvoir, décide de les publier dans Lettres à Nelson Algren.
Qui se chargera d’arrêter la relation ?
Certains disent que Nelson s’est « lassé »… Il faut se faire une opinion à la lecture des mots de Simone de Beauvoir.
Je veux tout de la vie, être une femme et aussi un homme, avoir beaucoup d’amis, et aussi la solitude, travailler énormément, écrire de bons livres, et aussi voyager, m’amuser, être égoïste et aussi généreuse… Vous voyez, ce n’est pas facile d’avoir tout ce que je veux. Or quand je n’y parviens pas, ça me rend folle de colère.
Simone de Beauvoir, Lettre à Nelson Algren 3 juillet 1947
Après Nelson Algren, il y en eut d’autres. Puis la très belle rencontre avec Claude Lansmann fera naîtreun amour fou et libre. Mais c’est une autre histoire…
Sources
Lettres à Nelson Algren – Un amour transatlantique 1947 – 1964- Simone de Beauvoir paru chez Gallimard puis en Folio actuellement.
France Musique – Simone de Beauvoir et Nelson Algren, un amour transatlantique…
Pour aller plus loin
L’Homme au bras d’or – Nelson Algren – Gallimard – Le roman fut adapté au cinéma par Otto Preminger en 1955- (The Man with the Golden Arm)
Bonjour Matatoune. Ces lettres sont très belles. Lui répondait il ? Je n’ai rien lu d’elle.. Bonne journée
Oui, ils ont échangé durant toutes les années de leurs relations. Moi, si mais il y a très longtemps 🙂 Bonne soirée
J’ai beaucoup aimé ta chronique.
Une autre façon de parler littérature 🙂 On a souvent la représentation d’une femme austère et bourgeoise avec son foulard en serre-tête, je trouve que cet amour et ses lettres la rendent plus proche, plus vivante 🙂
Je ne suis pas assez fan de la dame pour lire ses lettres d’amour … Son côté moraliste et donneuse de leçons m’agace ( oui, je sais, c’est pas bien, la féministe et le troisième sexe quand même … )
J’avoue être assez étonnée du courage de cette dame qui a parlé de féminisme dans les années 40… C’était une intellectuelle assez sûre de son pouvoir à la fois de séduction et de réflexion. Et, puis, pour exister à côté de Sartre, il faut quand même une sacrée personnalité 🙂
J’ai lu ce livre il y a longtemps. L’amour par delà un océan risque moins d’être usé par les contraintes de la vie quotidienne, mais c’est une histoire qui m’avait touchée.Bonne journée
De toute façon, elle ne vivait avec aucun ! Bonne soirée
j’ai le recueil effectivement des lettres à Niels. quelle femme ! quel tempérament ! sans admirer, je trouve néanmoins sa vie personnelle formidable de liberté. Merci pour ce clin d’oeil valentinesque
Clin d’œil valentinesque 🙂 Je prends l’expression
On parle toujours du couple de Beauvoir avec Sartre mais c’est vrai que chacun des deux avait d’autres histoires d’amour par ailleurs.
Bel article de Saint Valentin ! Bonne journée 🙂
Oui, il y en eut d’autres . C’était une femme libre !