Éléna Piacentini

Les Silences d’Ogliano

vagabondageautourdesoi.com - éléna Piacentini - Pour la première fois, je découvre l’écriture d’Éléna Piacentini avec ce magnifique roman Les Silences d’Ogliano, et je suis séduite et même envoutée. Cette chronique d’un village, imaginaire au sein du massif de l’Argentu, a l’évocation puissante des essences gorgées du soleil du maquis. Le jeune Libéro Solimane, pour entrer dans sa vie adulte libre et conquérant, doit rassurer les fantômes du passé, assumer ses désirs profonds et dompter sa colère.

Une fête est donnée par le notable du lieu, le Baron Delezio, pour la fin des études secondaires de son unique fils, Raffaele. Alors, tout le village s’affiche avec ses non dits, ses influences et ses ressentis. Comme un rapace annonce un malheur dans un ciel azur, le décès de la vieille Herminia, dite la folle, déclenche une série d’incidents dont le rapt du fils du notable.

Libéro doit s’arracher à l’aura de Tessa, jeune épouse du baron à la sensualité provocante. Il est fils de l’Argenta, institutrice du village, Cette femme, fière et altière, a choisi d’élever seule son fils qu’elle souhaite libre et fort. Le grand-père est choisi comme tuteur de vie. César, l’artiste bijoutier et ancien carabinier, est présent aussi pour lui apprendre l’exigence du travail bien fait, la recherche de la beauté et de l’excellence.

L’atmosphère de ce roman, Éléna Piacentini l’approche avec les descriptions de ce lieu où la nature sauvage s’emmêle à l’histoire de ce village. Libéro devra la décrypter pour s’en détacher. Le récit d’aventures qui l’entraîne aux confins de ce massif, comme au fond de lui-même, met à nu des histoires oubliées, transfigurées ou falsifiées racontées dans ce massif sauvage. Les drames vont façonner les hommes comme la rudesse, le massif.

Une grotte aux fées abrite les désirs les plus chers à l’ombre des regards désapprobateurs. Le récit est entrecoupé par les voix-off des personnages. Chacun à leur tour raconte leur vérité et leurs ressentis.

Pour conclure

Éléna Piacentini décrit avec sensualité cet univers romanesque où l’Antigone de Sophocle est constamment aux côtés du jeune Raffaele comme une initiation au monde, pour comprendre les hommes, pour canaliser son dépit et sa colère, pour  tenter de naître à sa vie adulte sans les chaînes du déterminisme social. Et, tout rejaillit sur le jeune Libéro !

Comme la couverture de ce livre, les aventures au pays de l’Argentu illuminent Les Silences d’OglianoÉléna Piacentini décrit une fable sociale où deux jeunes hommes apprennent à dépasser les secrets de leurs familles, les pouvoirs établis et le fatalisme de leur position sociale pour fonder leurs valeurs adultes… Pour un été, au bord d’un ruisseau avec le maquis comme horizon !

Puis quelques extraits

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Non! Le même droit pour tous, bons et méchants, petits et grands, sinon, rien ne tient ensemble! Une seule justice, des lois équitables et des hommes intègres pour les servir. Pas le fait du prince ou des Don ! Voila comment les choses devraient être, Raffaele ! Voilà comment elles ne sont pas chez nous ! lci, tout dépend de ta famille et de tes relations. Les combines et les passe-droits en haut de l’échelle ont tué l’idée de justice. Ça c’est la première violence et il n’y a que ceux qui la subissent qui la voient. Elle en appelle une autre qui fait des morts. Tu sais pourquoi ? Parce que là où il n’y a plus I’espoir d’une égalité de traitement, il ne reste que la loi du plus fort.

J’étais médusé d’entendre mes révoltes prendre chair dans cette grotte transformée en théâtre.

Ils nous tondent la laine sur le dos et quand ils font l’aumône, en plus, il faudrait dire merci.

Homme ou bête, si l’on ne faisait plus la différence, on se perdait.

Non il n’y a ni petits ni grands destins, jai mis du temps à le comprendre. Ce qui importe, c’est le sens qu’on y met et l’attention qu’on accorde à ce qui a de la valeur. la même façon. Le sablier, il s’écoule pour tous de la même façon. Les comptes, les vrais, ils se font à la fin.

Et encore

(…) mais j’ai trouvé dans cette pièce assez de questions pour remplir toute une vie. Les personnages de Sophocle m’ont interrogé, c’est… comme s’ils m’avaient tendu un miroir.

Les gens d’ici gobaient sans sourciller des histoires de Vierge pleurant des larmes de sang, de sorcières et de fées, ils craignaient le passage du cheval boiteux, mais à la mafia, ils faisaient mine de ne pas y croire. Ils refusaient de la nommer. A quoi bon designer ce qu’on ne peut affronter ?

Ce qui nous distingue les uns des autres, c’est ce qu’on fait de sa colère.

Ici en bref

D'habitude, je ne partage pas mes lectures lorsqu'elles ne m'ont pas plue ! Mais, là, c'est le livre qui se vend à plus

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Premier extrait : Avant la fête, un enterrement !
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Second extrait
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3ème extrait : La fête !

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Questions pratiques

Éléna Piacentini – Les silences d’Ogliano

Éditeur : Actes Sud

Twitter : @ActesSud Instagram : @actessud

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Parution : 5 janvier 2022

EAN : 9782330161255

Lecture : Juin 2022

Littérature contemporaine

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Chroniques littéraires

17 commentaires

    • Serait ravie de lire ta chronique! Est-ce que la conteuse sera intéressée par des passages de ce roman que j’ai trouvé magnifique 🙂

  1. Une atmosphère qui devrait me plaire. J’aime bien les extraits et suis curieuse de cette figure masculine guidée par Antigone.

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