Le deuxième roman d’Olivia Ruiz vient de sortir avec une promotion assumée directement par l’auteure-compositrice-interprète, actrice et réalisatrice. Car, c’est peu dire que cette artiste utilise toutes les formes d’art pour exprimer son talent. Écoute la pluie tomber raconte une histoire de femmes volontaires, engagées et téméraires dans un petit village languedocien autour d’un café, lieu de convivialité par excellence.
La perte d’une nièce rouvre les portes d’un passé douloureux et caché. Du coup, le lecteur en devient le témoin.
Carmen se raconte depuis sa venue à vingt-et-un ans à Marseillette, en 1977. Jeune fille timide, petite dernière d’une fratrie, est recueillie à Narbonne en février 1939, puis chez sa sœur aînée Léonor et, au moment où s’ouvre ce roman, au café de Rita et de son mari Alain. L’absence de ses parents, sans qu’elle en sache assez, transforme son énergie en colère, et même rage à vouloir tracer un chemin différent de ses sœurs.
Ses envies d’autonomie et d’indépendance lui font croire à toutes les chimères qui vont traverser son espace resté protégé. D’ailleurs, elle choisit de revenir en Espagne au côté d’un homme au charme envoutant. Évidemment, d’événements en déboires, Carmen, surnommée Cita par ses sœurs bien-aimées, finira par connaître la quiétude.
Le prologue de Écoute la pluie tomber est un hommage magnifique à cette nièce que Carmen a tant chéri ! Et le début du roman est assez intense. Puis, pendant quelques pages, la narration devient brouillon en partant dans trop de sens à la fois. Néanmoins, Olivia Ruiz, au fur et à mesure, réussit à se recentrer sur le vécu de son héroïne pendant plus de vingt ans.
Olivia Ruiz a beaucoup de talent pour entrainer son lecteur vers ces déracinés que sont les réfugiés espagnols mais aussi, ici, la communauté gitane qui s’est établie autour de Narbonne et de Montpellier. La langue espagnole y est présente même dans ce titre traduit de Escota quand ploù, très poétique ! C’est cette tonalité qu’on entend tout au long de ces pages qui rapidement envoute le lecteur.
Mais ce qui caractérise vraiment l’écriture d’Olivia Ruiz, c’est sa capacité à faire naître et vivre simplement devant nos yeux ses portraits de femmes, bohèmes, émancipées, téméraires, sachant dépasser les épreuves sans perdre de leur liberté d’esprit.
Alors, de premier en second roman, Olivia Ruiz interroge l’identité, la place dans le pays de l’exil, l’histoire familiale et ses secrets, mais aussi des liens de sang et la liberté. Un bien agréable moment de lecture !
Puis quelques extraits
Parce que ma blancheur avait besoin d’ être entachée pour se révéler, ma naiveté besoin d’une méchante secousse pour céder sa place à la lucidité.
Tout ça, c’est de la faute de mes sœurs. Elles ont voulu jouer les mamans, mais elles sont passés à côté de l’essentiel : me préparer à la vraie vie. Celle qui te prend par surprise, te défonce, te demande une vigilance de tous les instants. Parce qu’il suffit d’un battement de cils pour basculer dans le chaos. Protéger, c’est former. Donner des clés. Pas ouvrir les portes.
Ses mâchoires se serrent au point de faire du sable avec ses chicots.
Ici c’est chacun pour soi, et Dieu pour personne.
Escuchame, si tu étais restée en Espagne et que tu avais échappé aux bombes qui ont détruit ta vie d’avant, deux possibilités. La survie de tes parents n en était pas une, puisque les soixante-quatorze autres membres de leur front ont été butés. Les phalangistes ont même réussi à retrouver ceux qui étaient planqués à l’étranger. Bref, toi, fille de vaincus, « ennemie de l’intérieur», tu aurais été identifiée comme lune des leurs, donc soit tu aurais été torturée à mort, pour obtenir des informations, soit tu aura vécu cachée, affamée, jusqu’à perdre même le souvenir de tes valeureux parents.
– C’est un acte héroïque de t’avoir envoyé en France ! Tu peux être fière du courage dont a fait preuve ta maman en se sacrifiant sur l’autel de ton futur. C’est ça une résistante.
Le bourgeois ne supporte pas qu’on lui résiste, même quand c’est un bateau de trente mille tonnes qui lui impose sa volonté, il va jusqu’à ôter la cuillère en argent de sa bouche pour pouvoir l’ouvrir en grand.
Une union sans faille, digne d’un maquis communiste !
Ce fil invisible qui se tisse dans nos rires, et qui , de querelles en incompréhensions, de gages d’amour en réconciliations, se renforce toujours.
Il suffit d’une toute petite brèche pour s’engouffrer dans la lumière.
Ici en bref



Du côté des critiques
La Vie –
Pour aller plus loin
La commode aux tiroirs de couleurs – Olivia Ruiz
Questions pratiques
Olivia Ruiz – Écoute la pluie tomber
Twitter – Instagram : : @oliviaruizofficiel
Éditeur : JC Lattès
Twitter : @editionslattes Instagram
Parution : 11 mai 2022
EAN : 9782709670081
Lecture : Mai 2022
Bonjour Matatoune. Ce roman me tente et je le chercherai à la médiathèque. Bon après-midi
Oui Olivia Ruiz a un grand talent pour de rire de beaux portraits de femmes !
Elle a un sacré talent car j’appréciais beaucoup la chanteuse. Je compte lire ce second roman d’Olivia Ruiz. Merci pour ce joli retour 🙂✨
J’ai beaucoup aimé son premier roman, je note celui-ci. Bon dimanche
Mathias Malzieu, pardon 🤭
Pas de soucis 🙂
J’ai bien aimé la période de “la femme chocolat” avec Mathieu Malzieu. Il lui manquait son propre univers. Il me reste à le découvrir.
Merci Mata, bon week-end 🙏👏
A découvrir ! Il devrait te plaire. Mais commence peut-être par la commode 🙂
Si il est aussi bon que son précédent, je suis tentée.
On y retrouve sa patte !
Déjà son premier roman ne m’avait pas attiré mais je l’avais offert (sans échos ensuite ???) celui-ci ne m’attire pas plus 🙂
Ok, pas de soucis 🙂 Bon week-end !
Belle chronique mais je ne suis pas vraiment tentée par Olivia Ruiz- une chanteuse qui ne me fascine pas plus que ça.
Non, moi non plus. Mais la femme se révèle attachante 🙂
J’avais beaucoup aimé son précédent livre “La commode aux tiroirs de couleurs”…
Peut-être un peu moins prenant que le précédent au départ puis après on retrouve son style et sa présence !