Delphine Saubaber La fille de la grêle

Rentrée littéraire hiver 2022

vagabondageautourdesoi.com -Delphine Saubaber Delphine Saubaber signe le roman, La fille de la grêle, sensible et bouleversant, sur une femme âgée qui décide de livrer à sa fille bien aimée l’histoire de son enfance, cachée depuis toujours derrière son masque social. Mais, ce roman aborde aussi le suicide médicalement assisté, acte décrit ici comme une ultime liberté de sa vie.

Quelques mots de l’histoire

Dans cette unique lettre à sa fille, Adèle, Marie raconte ses années d’enfant dans la ferme familiale auprès de Joseph et Madeleine, ses parents, qu’elle a toujours vu travailler pour survivre. Métayer d’une terre qui appartient aux Soubiran, Marie va comprendre très vite qu’il ne suffit pas de travailler pour pouvoir vivre, mais que le travail est indispensable à la liberté qu’il apporte. La lecture qui l’accompagne jusqu’au bout de sa vie, elle la découvre chez les propriétaires. Elle fait aussi avec eux l’apprentissage de la différence sociale qu’elle s’acharnera toute sa vie à combler.

Delphine Saubaber décrit cette vie simple soumise complétement aux aléas de la nature que Marie parcourt avec son frère Julien, deux ans plus jeune, plus libre et plus ébahi qu’elle. Elle va se comporter avec lui comme la grande sœur aimante et protectrice, image qui la rassure, mais que dément son secret. Comme la grêle qui va ravager une année de labeur et plonger la famille dans la pauvreté, la violence s’installe au cœur d’une maison où la cheminée ne fait chauffer qu’un bouillon clair.

La nature y est présente, grandiose, apaisante et indispensable pour retrouver l’énergie nécessaire au quotidien. Toucher l’écorce d’un chêne est une merveilleuse dernière façon de rappeler que cet univers est fragile et qu’il faut en prendre soin. Véritable cri d’amour mais aussi de révolte, Marie l’assume comme une responsabilité à partager par tous.

La fille de la grêle présente aussi cet amour maternel qui n’a certainement pas su se dire assez dans le quotidien. Que ces mots sont agréables à lire, surtout lorsque cet amour manque toujours terriblement malgré les années passées. Doux et tendres, ils inondent le lecteur de la tendresse de cette femme qui a profondément aimé et chéri son unique fille.

Pour cette expérience si unique, Marie ne souhaite pas être une charge pour celle qu’elle aime plus que tout et décide de choisir l’heure de sa mort. Cette confession qui dure tout le roman accompagne l’hébétude que Adèle va ressentir en se découvrant seule.

En conclusion,

En donnant le secret de sa vie, Marie demande à celle qu’elle aime le plus de comprendre son geste, de l’approuver et peut-être de le revendiquer pour d’autres. Mieux qu’un essai, Delphine Saubaber livre une mise en situation de cette demande que la société tarde à entendre !

Dès les premières lignes, j’ai su que ce roman allait me toucher ! Et, jusqu’au bout, je n’a pas été déçue, au contraire ! Bien sûr, le sujet reste difficile, mais le regard que porte Delphine Saubaber sur la vieillesse est empreinte d’une telle affection pour son personnage qu’elle sait trouver les mots qui apaisent et consolent ! A recommander, vraiment !

Remeciements à @editionslattes et @NetGalleyFrance pour #lafilledelagrele de #DelphineSaubaber

Puis quelques extraits

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(…) nous sommes tous en état de survie. Ta génération trop gâtée et saturée de consommation le découvre, prenant soudainement conscience de la menace et de sa précarité ! Moi, je l’ai vécue toute mon enfance. Nous avons oublié que nous ne sommes que des humains et que la nature est mère, et moi, la fille de la grêle, je t’ai élevée comme une fille de la ville dans le coton et l’insouciance alors que j’aurais dû t’alarmer, d’enseigner l’humble patience, la lenteur , la résignation de mes parents. (..) Qu’est ce que j’ai pu t’emmerder sous prétexte de te protéger ! (..) Je voulais éloigner de toi la douleur des générations passées. T’immuniser contre la peur. Au lieu de ça, je t’ai refilé la mienne, dont tu n’as jamais su d’où elle venait.

Je sais juste que ce soir- là, le chagrin m’a logé une balle en plein cœur.

Je ne dis rien parce que je crains d’avoir à montrer ce que je suis, ce que nous sommes, je me sens comme la tâche de gras dans le bouillon de mon père.

Sait-on d’ailleurs véritablement ce que l’on veut dans la vie à part fuir ?

J’ai tué la grêle, l’injustice et la violence du monde. J’ai tué la détresse d’un homme qui pleurait avec ses poings.

Et, encore

Un enfant qui en veut à sa mère ou à son père, à ce qu’il aime le plus au monde, à ce qui est censé le protéger, est en proie à une indescriptible angoisse. Il veut juste débloquer l’air qui l’asphyxie, la violence qui monte en lui et dont il sent qu’elle va l’envahir à son tour.

Toute ma vie, j’ai cherché les mots. Je les ai cherchés pour échapper à la sidération du réel.

Le sait-on assez que la vieillesse, cet état de dépendance, cette clôture de la liberté, est une réminiscence de l’enfance sans horizon ?

Quand on vieillit, on se retourne vers le passé, on fouille ce qui a été, on s’en remplit de peur de se vider.

Je veux que tu gardes de moi l’image de ce sourire tendre, le sourire d’une maman qui t’aime et t’aimera toujours, ou qu’elle soit, partout où tu es. Ce sourire qui a accouché de toi.

Un vieux marche et meurt sans faire de bruit.

Je n’étais pas malade, j’étais juste vieille. C’était la mort ou la d’échéance. J’ai choisi. Et tu n’as pas eu à le faire pour moi.

Ici en bref

D'habitude, je ne partage pas mes lectures lorsqu'elles ne m'ont pas plue ! Mais, là, c'est le livre qui se vend à plus

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Premier extrait
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Puis un second
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Puis le dernier

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Delphine Saubaber – La fille de la grêle

Éditeur : Éditions Lattès 

Twitter :  @editionsLattes  Instagram : @editionsjclattes

Parution : 12 janvier 2022

EAN : 9782709669283

Lecture : Janvier 2022

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17 commentaires

  1. Dans ce roman, on se demande ce qu’il y a d’autobiographique, l’auteur, comme le personnage Marie, est journaliste. Ce roman pose la question : Que transmettons nous à nos enfants ? Et répond de manière simple. C’est ce qui nous émeut en lisant. Ce n’est ni gai ni triste ( même si la tragédie fait partie du passé de Marie) c’est sincère, sans concessions, sans apitoiement non plus : un regard simple et limpide sur toute une vie. L’écriture est poétique, en raison des références permanentes à la nature environnante.
    (Ce roman fait partie de la sélection Roblès, prix décerné début juin.)

    • Ah, je ne savais pas pour le prix! C’est un toman émouvant, c’est vrai tout en simplicité … On attend alors pour les délibérations.

    • Oui, il serait temps que la société s’en empare mais, notre monde est actuellement tellement divisé en ce moment que ce n’est pas le moment d’en rajouter!

  2. le thème du suicide assisté m’intéresse mais j’ai fait l’impasse parce que ma liste NetGalley vient de s’allonger +++ je le note quand même dans un coin de ma tête 🙂

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