Cette rétrospective sur Georgia O’Keeffe bouleverse la présentation chronologique habituelle de ce type d’exposition. L’espace est ouvert. Du coup, le visiteur suit sa curiosité et son envie. Au départ, on s’y perd. Puis très vite, le visiteur se prend au jeu, avance, recule, revient revoir une toile, discute, argumente et repart vers une autre. C’est vivant même si c’est osé ! Belle initiative !
Mais, c’est quand même la première fois après l’exposition de Grenoble qui présentait quatre-vingt tableaux en 2015 en les reliant à ses amis photographes que l’icône de la peinture américaine. Cette exposition fut présentée à Madrid cet été et rejoindra la Fondation Beyeler à Bâle au début 2022.
Sa formation
Issue d’immigrés européens implantés dans le Wisconsin, la famille de Georgia O’Keeffe (1887- 1986) est implantée dans une ferme. Seconde d’une famille de sept enfants, la légende veut qu’elle est exprimée son désir de devenir peintre dès l’âge de douze ans! De sa mère, elle tient sa volonté de réussir, son souci d’indépendance et sa recherche de liberté.

Après des études d’art à Chicago, elle se rend à New-York. Et dès 1907, elle intègre une école pour apprendre l’impressionniste, étape de la recherche de son propre style. Son amie Anita Pollitzer, rencontrée à l’université de Colombia, dira d’elle qu’elle était “directe comme une flèche” et “terriblement indépendante”.

Elle visite la galerie d’Alfred Stieglitz photographe réputé pour être le premier à importer aux États-Unis les peintres européens modernes comme Matisse, Picasso, Brancusi et Rodin. Elle lit beaucoup et notamment le magazine de la galerie Camera Works.

Obligée de retourner dans sa famille, sa sœur l’encourage à poursuivre ses recherches et à suivre les cours d’Arthur Wesley Dow. Profondément influencé par l’influence japonaise, il permet à Georgia O’Keeffe de définir son style. Mais, il s’agit de gagner sa vie et elle devient enseignante au Texas. Elle y découvre les espaces, les ranchs et la solitude des randonnées.

Parallèlement à cette vie simple, elle fait la connaissance de Arthur Mac Mahon dont elle tombe amoureuse. Elle envoie des fusains à Anita qui sans la prévenir les présente à Alfred Stieglitz. Il tombe instantanément sous le charme de ce travail et l’expose dans sa galerie.

Enfin, elle est reconnue artiste à part entière
Georgia O’Keeffe fait 3000 km pour retrouver Arthur et passe à la galerie demander à Alfred Stieglitz de qui il a pris l’autorisation d’exposer ses œuvres. Celui-ci la décide à lui laisser ses œuvres. Elle repart au Texas pour enseigner. Une relation épistolaire se met en place entre les deux et Arthur devient juste un ami.

Affaiblie, elle part rejoindre Alfred Stieglitz qui la protège et la soigne. Ils habitent au dernier étage de l’hôtel Shelton à new-York. Très ambitieuse, sensuelle, indépendante, elle savait qu’elle avait croisé quelqu’un qui aurait beaucoup d’importance pour sa carrière. Non seulement, ils deviennent amants très tendres mais aussi entre eux nait une amitié dévouée et une émulation créatrice qui les inspire. Elle peint les immeubles de la ville. Ces tableaux sont peu présents à l’exposition.

Marié à une femme très riche, Alfred Stieglitz avait des idées proches de l’anarchie et aimait bousculer les lignes et les limites. Le couple vit des jours heureux dans la propriété familiale. Néanmoins, en la présentant officiellement à sa famille, Georgia O’Keeffe attire les jalousies ce qui la fragilise.

En 1921, Alfred Stieglitz organise une exposition de ses photographies où figurent de nombreux nus de Georgia. Tous les contemporains expliquent qu’elle était très à l’aise avec son corps et la nudité ne la gênait pas. Certaines de ses peintures sont aussi exposées.
Une féministe ?

Georgia O’Keeffe a choisi depuis quelques temps de peintre des fleurs en grand format, comme une photographie macro. Elle dira souvent dans les interviews plus tard que si elle avait fait des petites fleurs, personne le les auraient remarquées. La confrontation des photographies et des peintures lui permet de devenir une star médiatique du jour au lendemain. Seulement, cette exposition s’accompagne de scandales.

Pourtant Georgia O’Keeffe a toujours, avec un petit sourire, exprimé que ses peintures puisaient dans ses émotions et a toujours refusé de rejoindre un mouvement féministe. Pourtant en choisissant les fleurs, elle affirme la part sensuelle d’une son androgynie, fière de sa féminité mais aussi son côté masculin qu’elle incarne aussi.
Alfred Stieglitz divorce. Du coup, il doit réduire considérablement son train de vie. Ils logent dans un appartement à New-York avec une vue magnifique sur les gratte-ciels. Il la demande en mariage. Lui a soixante ans. Elle en a trente-sept et elle finit par accepter.
La ville de New-York entre dans son œuvre. Elle vend de plus en plus et assure les finances du couple. Néanmoins, Alfred Stieglitz s’éprend d’une nouvelle muse Dorothy Norman , jeune et jolie photographe, qui devient rapidement son amante et son associée.
Georgia O’Keeffe se sent blesser et décide de partir vers le Nouveau Mexique où elle découvre la culture indienne par l’intermédiaire du mari de son hôte. Les premiers crânes apparaissent dans sa peinture.

Le Nouveau Mexique
En 1922, elle partage sa vie entre l’Ouest et l’Est. Alfred Stieglitz ouvre une nouvelle galerie et expose les photos de Doroty Norman. Georgia O’Keeffe ne supporte plus la situation de la présence de la nouvelle amante et décide de partir.
Elle s’installe définitivement au Nouveau Mexique en achetant une hacienda et se consacre exclusivement à sa peinture.

Alfred Stieglitz ne viendra jamais la voir. Elle découvre la nature, à pieds, à cheval ou avec ses voitures qu’elle transforme en atelier mobile. Elle aime coucher à la belle étoile.

Artiste profondément américaine, ses tableaux révèlent la profondeur d’un paysage unique. A soixante ans, elle devient une icône. Le MoMA organise en 1946 sa première rétrospective pour une artiste féminine.

La solitude de Georgia O’Keeffe
Après une nouvelle crise cardiaque, Alfred Stieglitz décède. Georgia O’Keeffe disperse ses centres sur ses terres chéries. Jamais, les deux anciens amants n’ont été vraiment séparés en témoigne l’échange de lettres qui n’a cessé entre eux.

Plus elle avance en âge, plus l’abstraction est présente. Elle ne sait pourquoi des formes l’obsède qu’elle reproduit sur ses toiles. Il y a eu la période “porte et patio” qu’elle a acheté pour les peindre à loisir.

A la fin de sa vie, elle perd sa vue. Pourtant elle continue à peindre aidé par une main secrétaire. Elle meurt à 98 ans en 1986 à Santa Fé.

En conclusion,
Cette rétrospective démontre que les peintures de Georgia O’Keeffe sont d’une diversité incroyable. Connue pour ses peintures de fleurs qui ont fait scandale, le Centre Pompidou dépasse la polémique pour décrire l’engagement solitaire d’une femme du début du siècle dernier qui n’a cessé d’affirmer sa différence, son indépendance et son engagement. Grandiose !
Pour aller plus loin
Georgia O’Keeffe – Moderne et muse à la fois
sous le ciel immense selon Georgia O’Keeffe
Du côté des critiques
Télérama – Les Inrocks –
D’autres blog en parlent
MHF Le blog –Lunettesrouges 1 – INITIAL E – Blog de France Fougère – La passerelle des arts de Chaville – Choses vues – CirceZaar –
Questions pratiques
Georgia O’Keeffe, l’esprit pionnier – Centre Pompidou
Twitter : @CentrePompidou Instagram :@centrepompidou

Bonjour Matatoune. C’est vrai que ses toiles sont très diverses et très modernes. C’est une découverte pour moi. Bonne journée
Georgia O’Keeffe est une grande révélation en France. Et, l’étendue de son talent est remarquable ! Bonne soirée
C’est avec bonheur que je découvre aujourd’hui seulement votre blog, sous l’égide de Georgia O’Keeffe. La visite de cette exposition fut un grand moment de découvertes, une rencontre.
Oui, un très bon moment de découverte d’une œuvre que j’ai été ravie de découvrir dans toute sa complexité.
Article très intéressant sur cette artiste très touche-à-tout !🌞
Oui 99 ans de vie, ça fait long ! 😉
Très belle expo, et votre article très intéressant résume bien les différentes facettes de cette artiste et de son style ! Bonne journée !
Oui, cette expo est à découvrir si on en a l’ occasion …Un très bon moment !
Je suis étonnée de la modernité de ses toiles. Merci pour cette découverte.
Oui, et une floraison de thèmes. Une artiste remarquable !
Quelle magnifique exposition, et si elle vient à la fondation Beyeler l’année prochaine, j’aurai la chance d’en profiter. J’aime beaucoup les oeuvres de cette artiste mais je ne savais pas qu’elle avait traité tant de sujets différents. Bonne journée
Oui des 2022, la fondation Beyerler la reçoit. C est une très belle rétrospective. J’espère que elkd te plaira ! bonne journée