A la machine, tout petit roman, qui permet à Yamina Benahmed Daho de nous immerger dans le monde ouvrier du XIXè siècle mais aussi dans son histoire familiale, qui ressemble à beaucoup d’autres.
Quelques mots sur l’histoire
Barthélémy Thimmonier a choisit de se trancher les premières phalanges de l’index et du majeur pour ne pas rejoindre l’armée Napoléonienne. En effet, Barthélemy est plutôt ingénieux car de ces guerres, ceux qui en sont revenus ont perdu plus que deux phalanges !
Devenu tailleur, il songe à un outil pour soulager ses mains mais aussi ceux de sa femme qui ne cesse de broder. Et, il invente une machine inédite. Il répond à la demande de l’armée en offrant aux troupes des uniformes moins criards. Seulement, les coutures ne sont pas assez solides. Alors, Barthélémy cherche et améliore son prototype.
Convaincu de l’avancée que procure sa machine, il songe à partager. Et c’est là que ça devient difficile. Oh pas pour trouver des partenaires, il n’y en aura au moins trois sur des périodes différentes. Non, c’est la compréhension du profit et de ses règles qui va lui manquer. Ne sachant ni où et ni comment déposer un projet. Ni discuter un contrat, s’associer et en prévoir les clauses équitables. Ni même envisager une production, la vérifier, etc. Tout ce qu’un ouvrier n’a jamais ni appris, ni vu, ni entendu parler dans sa classe sociale…
Alors, beaucoup de misère et de déceptions mais aussi beaucoup d’inventivité pour perfectionner sa machine d’année en année jusqu’à ce qu’un certain Singer, américain, en fabrique plus de cinq milles par semaine. Et l’outil qui devait libérer les mains et soulager les articulations enflammées est devenu asservissement et signe de pauvreté.
Alors …
En redonnant à Thimmonier Barthélémy la place qu’il mérite, Yamina Benahmed Daho retrace l’histoire de l’industrialisation mais vue du monde ouvrier. Du côté de ceux dont le visage est noirci et émacié par le manque d’hygiène, de sommeil, de nourriture. Le manque de tout, en fait. Alors que la bourgeoisie se frotte les mains et compte ses actions.
Yamina Benahmed Daho raconte comment Guignol éveille les consciences. En traversant la révolte des Canuts, l’auteure décrit les traboules avec ses tavernes où pour oublier qu’on travaille 7 jours sur 7 et qu’on est affamé, on s’endort sur la table son verre à moitié plein.
C’est un petit bijou que ce roman. Bien sûr pour cette capacité à restituer l’ambiance du monde des petites mains si peu raconté. Mais aussi, pour sa faculté à relier au travers d’un outil la petite histoire familiale de chacun. Car nous avons tous dans nos souvenirs une femme (ou un homme) penché(e) sur un tissu pour le coudre sur sa machine…
Pour ne plus oublier Barthélémy Thimmonier et son désir d’alléger la charge de travail de tous ceux qui transforment un tissu en vêtement, Yamina Benahmed Daho offre un roman d’une rare sincérité sur cette classe ouvrière qui a cru au progrès mais n’en a que peu perçu les avantages.
Puis quelques extraits
Barthélemy regardant Madeleine regarde en fait la main de l’homme créant l’aiguille à chas il y a plus de dix mille ans.
La dure loi du plus riche et la règle de la hiérarchisation sociale font rapidement passer Barthélemy du statut d’inventeur du métier à coudre à celui de co- inventeur et mécanicien.
La raison du plus fort étant toujours la même – nous l’allons montrer tout au long de ce livre-, c’est le plus puissant qui décide de la répartition du fromage et de l’organisation de l’entreprise.
Le système industriel décide ainsi du sort des hommes : un été, il peut faire d’un petit tailleur rhodanien un directeur d’atelier et, au début de l’automne, un mendiant.
Il pense comme son siècle que la douleur est soit l’expression du démon soit une forme de rédemption.
Aux yeux des fabricants, on n’est jamais que des canuts sans cervelle, bons à pousser des navettes de droite à gauche et de gauche à droite . On obtiendrait du pain qu’ils s’arrangeraient pour nous priver d’eau.
On rejoue Guignol depuis deux siècles parce que le théâtre, fut-il de marionnettes, et la rue sont des formes de vie à la fois parallèles et dépendantes.
Il se rappelle avoir entendu que l’expérience de la douleur est toujours utile pour évacuer ce que le corps renferme, cache, n’ose exprimer.
Ici en bref

Un autre extrait
Supprimé à la demande de l’auteur.
Puis un troisième
Supprimé à la demande de l’auteur.
Puis un dernier
Supprimé à la demande de l’auteur.
Du côté des Critiques
Le Progrès – L’Humanité –
D’autres blogs en parlent
Librairie Diderot – Johan Faerber Diacritik – Diacritik
Pour finir
Questions pratiques
Yamina Benahmed Daho – A la machine
Éditeur : Gallimard
Twitter : @Gallimard Instagram :@editions_gallimard
Parution : 4 février 2021
EAN : 9782072929960
Lecture : Mars 2021
Un petit roman que je m’empresse de noter.
J’ai bcp aimé. De plus, cet outil est attaché pour chacun à des souvenirs souvent forts. Donc, j’attends ta chronique
alors je note pour le faire acheter à la biblio !
Ah oui dans une médiathèque il ferait merveille car j’imaginerais bien un prof de français u d’histoire le faire lire à des élèves d’une filière professionnelle métiers de la mode …
ajouté également à ma PAL pour plus tard quand elle sera moins énorme 🙂
Bonjour Matatoune. Merci pour ton commentaire de ce jour qui m’a émue. Ce livre mle gtente bien et je dsais à qui l’offrir ensuite. Bonne journée
Oui, il devrait te plaire ! Merci et bonne soirée
Ajouté à ma PAL 👍👍🙏🙏
Merci pour votre confiance mais c’est une vrai belle découverte
Tu as le don de dénicher les pépites et de donner envie de les lire. Bonne soirée
Oh, cette pépite vient d’une personne que j’aime bcp ! Bon week-end