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Après les chiens – Michèle Pedinielli

@vagabondageautourdesoiPrix Instant polar de Dissay 2020

Présentation

Ghjulia Boccanera, surnommée Diou, est une enquêtrice façon Nestor Burma qui aurait laissé la grisaille de Paris pour le soleil et les quartiers populaires de Nice. Michèle Pedinielli raconte dans « Après les chiens » qu’en 2017, Boccanera décide d’enquêter sur le meurtre d’un Érythréen. Elle a son entrée dans la maison Police. Pour elle, c’est son ex, commandant Santucci, qui enquête pour retrouver le (ou les ) meurtrier(s). De plus, une jeune fille, Mélody, a disparu depuis quelques heures. Elle s’était fâchée avec sa mère et son beau-père.

 Parallèlement à ces enquêtes, le mystérieux voisin de Boccanera a eu  la merveilleuse idée de lui laisser un manuscrit en succession. Celui-ci raconte l’histoire en 1943 des héros du quotidien qui sauvent  des hommes et des femmes fuyant l’Italie et ses griffes fascistes.

Boccanera va relever les routes migratoires, les droits bafoués, les fuites, l’angoisse et de la terreur. Quelle actualité pour ce roman paru en avril 2019 !

L’humanité de Michèle Pedinielli transparaît à chaque page, mais pas de bons sentiments qu’on distille « pour faire genre ».  Il s’agit d’engagement qui transparaît dans les mots, les anecdotes et le choix des personnages.

Au-delà des chaussures « Docs » que  Boccanera ne quitte jamais, Michèle Pedinielli décrit ses cicatrices comme fondatrices de son envie de justice. Sa fragilité transformée en témérité. Elle l’a tiré certainement du décès de ses parents, de leurs accidents et des cendres dispersées au – dessus de la mer. Cela lui vaut une liberté qu’elle revendique haut et fort en arpentant les rues avec sa vespa, débarrassée de l’ivresse de ses Bukowski. Même si elle doit assumer ses contradictions et ses insomnies, qu’elle soigne à coup de médocs comme d’autres, d’herbe poussée sur un balcon façon bio, ce portrait, réaliste, devient rapidement attachant.

Il s’appelait Yonas; il avait tout juste dix-neuf ans  et « Personne ne pousse ses enfants sur un bateau à moins que l’eau ne soit plus dure que la terre ferme ». Elle s’appelait Mélody et croyait à l’amour. Un polar à découvrir pour se souvenir des Yonas et Mélody et suivre l’intrépide et indépendante Boccanera !

Pour aller plus loin :

Certains des personnages repris du premier roman « Boccanera » sont des exemples de la diversité dont Michèle Pedinielli se revendique : par exemple, le portrait de Nadia, serveuse en boulangerie, avec son chromosome en plus, celui de la gentillesse ! Il y a aussi Ferdi, allemand et muet, amateur de whisky douze ans d’âge, mais qui préfère l’inconfort du bois au lit douillet de la chambre au foulard rouge; Dan son coloc et ami fidèle qui lit du Sorj Chalandon. Dagmar et bien sûr, Casalès en tatoué amoureux, contraint de se saouler pour l’avouer.

Puis quelques extraits

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De grands tirages noirs et blancs, des morceaux de corps. Un buste mince dont le sein droit tout rond cohabite avec l’absence de son frère gauche.

Au niveau de mon nombril et sur mes flancs, mes trous petits taches blanches. Je ne sais pas ce que Serena a fait, mais on dirait qu’elles brillent, comme des lucioles gardiennes de mon ventre vide. Les cicatrices d’une lutte contre la maternité.

Toute une civilisation qui me voulait mère sous prétexte que j’étais femme.

Mon corps, mon choix, mon droit. Et ma lâcheté : (…)

Joseph Santucci voulait juste une vie avec moi. Dans une confiance totale cet mutuelle. Et, je l’en avais privé.

Juste avant la guerre, c’était l’inverse : des gens arrivaient d’Italie, avec leur drôle de langue et leur petite valise, guidés par Tonino qui les confiait à Ange pour qu’ils les descendent au village avant que Pierre ne leur trouve un moyen pour aller jusqu’à Menton ou Nice, où ils étaient en sécurité.

La frontière, c’est idiot. Une ligne invisible qui nous fait Français ou Italien. Quand j’étais tout petit, c’était un jeu. (…) Explosant de rire et piétinant cette ligne qui n’existait que pour les autres. Depuis le début de la guerre, la frontière ne me fait plus rire. (…) Mais où qu’elle soit, elle nous tranchait en deux.

Là où d’autres ont pu tutoyer Bukowski jusqu’à la fin, moi j’ai dû arrêter avant la limite, avant que mon ticket ne soit plus valable.

Parce que oui, j’aime bien prendre des petits cachets qui font planer mais j’ai du mal avec une infusion au glyphosate.

C’est bizarre d’écrire les émotions de l’époque avec les mots d’aujourd’hui. Ça les transforme, ça devient une histoire.

Je ne devrais pas me poser autant de questions, j’écris pour que les mots restent. Et les morts aussi.

Si cette jeune femme a un chromosome en plus, ce doit être celui de la gentillesse et de l’humour.

J’ai passé l’âge de discuter avec des mecs qui savent mieux que moi ce que j’ai envie de faire, quand, où, et surtout avec qui.

Ici en bref,

D'habitude, je ne partage pas mes lectures lorsqu'elles ne m'ont pas plue ! Mais, là, c'est le livre qui se vend à plus

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Après les chiens – Michèle Pedinielli

Éditeur : Éditions de l’aube

Twitter : @EditionsdelAube Instagram : @editions_de_laube

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Parution : 2 mai 2019

ISBN : 2815933314

Lecture : Mars 2020

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13 commentaires

    • Ce polar avec son enquêtrice assez atypique est un régal un peu décalé et surtout social ! Bonne continuation

    • Merci d’avoir relevé ce détail ! Rare, quand-même, dans le polar ! Bonne semaine, Eveline 😉

    • A chaque époque son style ! Burma c’est jazz et whisky. Diou c’est punk et eau. Bonne semaine, Renée

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