Plus jamais seul – Caryl Férey

Plus jamais seul – Caryl Férey

Éditeur : Gallimard – Collection série noire

ISBN : 2072757932

Février 2018

vagabondageautourdesoi-plusjamaisseul-wordpress- 1070321Dix ans que Mac Cash, le privé borgne et teigneux de Caryl Férey, n’avait pas montré le bout de son bandeau !

Je connais son style (Mapuche – Zulu). J’aime la façon dont Caryl Férey pose ses polars dans des problématiques sociales avec documentations et réalisme.

Plus jamais seul, Mac Cash ne le sera plus !  Car, il s’est découvert une fille, pré-ado de 12/13 ans, qui va l’accompagner, ou pas, dans sa recherche d’explications sur la mort accidentelle de son ancien pote Marc. Marc, marin expérimenté et avocat déjanté, a disparu en mer avec son superbe voilier heurté semble-t-il par un cargo.

Mac Cash est un ancien flic bourru, borgne souffrant le martyre par son œil valide qui pourrit, à l’instinct de mort très développé, anti-tout, teigneux et à l’humour acéré qui est affublé d’une ado pas compliquée, certes, mais qui a besoin d’attache. Il a l’amitié virile  qui laisse vivre l’autre mais elle devient tentaculaire lorsque le chaos guette.

Alors Mac Cash se déchaine et emploie des méthodes peu orthodoxes, violentes, toujours irrespectueuses des règles. Cette paternité nouvelle l’empêche d’apparaître comme une bonne grosse brute et lui donne une  consistance, ma foi, assez sympathique ! Autre personnage important, l’ancien éditeur grec qui va l’aider à rechercher un ancien amour qui, en son temps, a su lui saisir le cœur, elle-aussi !

Espérant comprendre ce qui est arrivé à son copain, Mac Cash se lance dans une enquête qui va le mener de la Baie des Trépassés en Finistère au Pirée puis dans une île grecque cherchant dans les milieux maritimes de quoi comprendre ce qui, pour lui, est inexplicable.

Comme le dit la pub, la série noire de Gallimard, « c’est angoisse, action, violence, corruption depuis plus de 70 ans ». Dans ce roman, tout les ingrédients sont rassemblés avec en plus, une façon de parler du monde, comme aime à le rappeler Caryl Férey.

Ici, est décrite une Europe qui au motif d’un libéralisme à outrance laisse les trafiquants de tous bords gérer les réfugiés et certains états, les flux migratoires. L’Afrique n’est pas en reste, puisqu’au travers les personnages de deux sœurs, va être abordé les premières vagues d’immigration en France et les actuelles.

C’est noir, trash, dark et violent, époustouflant comme un flash de lumière ! L’écriture est visuelle presque cinématographique. Le titre, emprunté à un groupe de rock – slam, remplit de son leitmotiv le polar, et elle n’est pas tendre et romantique. Ce privé borgne interroge et dérange, mais comme il venge, libère et remet de l’ordre dans du désordre, il m’a séduite.  Faudra-t-il attendre encore dix ans ?

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Il n’y a pas de destin, que cette foutue nostalgie du possible.

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On prend un enfant en photo sur une plage, on pleure sur son sort et on laisse des milliers de noyers en Méditerranée en arguant qu’on ne peut pas accueillir toute la misère du monde, on cherche à nous insensibiliser en masse. Ça fait partie du climat sécuritaire.

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Une amitié celte, semblable à un vieux grille-pain déglingué : difficile d’y entrer, impossible d’en sortir.

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Avec la crise migratoire, l’Europe marchait sur la tête, marchandait le flux des réfugiés avec un autocrate turc qui emprisonnait les écrivains et les journalistes, chiffrait le malheur à coups de quotas, signait des contrats d’armement avec les pays du Golfe qui soutenaient des groupes terrorismes responsables des mouvements de population vers le seul endroit qui pouvait les protéger : l’Europe.

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L’Europe continent refuge, se passerait-t-elle de démocratie ? Combien de temps encore avant que les technocrates du capitalisme financier ne prennent le pouvoir sur les peuples ? Combien de temps encore avant que les chiffres ne prennent le pouvoir sur les mots- liberté, égalité, fraternité ?

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L’objectif de la chasse-aux-sans-papiers n’était pas tant la fermeture des filières d’immigration que le conditionnement des futurs citoyens, pour qu’ils acceptent passivement le nouveau monde qu’on leur construisait, qu’ils apprennent qu’il n’y en aurait pas pour tous, entérinent cette frontière et la défendent.

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Du Nègre qui brille au soleil sous le regard impassible du patron, mais c’était ça ou rien- ou alors la crasse, une vie sans espoir, l’Afrique.

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Il fallait n’avoir jamais mis les pieds en Afrique ou au Moyen-Orient pour s’imaginer que c’était mieux là-bas.

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Moins d’un an s’était écoulé depuis son décès, Alice avait le même trou dans le ventre, ce manque, un vide sidéral où l’amour avait été aspire- à jamais.

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Équipages surmenés, sous-payés,voire pas payés du tout, mal formés, mal soignés, mal nourris, manquant d’eau potable, parfois incapable de communiquer entre eux, le transport maritime était une zone de non-droit pour un million de marins.

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Première partie -Chapitre 2 – Page 29
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Première partie -Chapitre 14 – Page 144
 « Obsédé par ma splendeur de naguèreJe décidai pour apaiser mes nerfs

De faire l’amour avec mon révolver

(…)

Qui cracha la flamme de mon feu d’acier

Entre mes mâchoires aux dents putréfiées…

Plus jamais seul

Plus jamais seul

Plus jamais seul

Avec une baston dans la gueule »

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Première partie -Chapitre 14 – Page 143


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Deuxième partie -Chapitre 7 – Page 241

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18 commentaires

  1. Toujours assez violent. J’avais été impressionnée par Zulu. Mais quelle intensité. Mapuche était un peu plus « romanesque » mais toujours avec un contexte fort. Je n’ai pas lu celui-ci mais je relirai l’auteur, c’est certain

  2. Jamais rien lu de cet auteur, mais j’ai bien compris que pour la découverte, il valait moeux commencer par Zulu ou Mapuche. Merci.

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